Dry Cleaning n’en fait pas tout un fromage

Dry Cleaning n’en fait pas tout un fromage

Ce n’est pas un secret : les festivals ne sont pas forcément le meilleur endroit sur Terre pour tailler la bavette avec un groupe. Difficile en effet de trouver le temps de se poser pour une interview consciencieuse entre une balance faite approximativement et un pétage de bide sponsorisé par le catering. Pour corser le tout, rajoutez une limite de 10 minutes d’entretien à ne pas dépasser et vous avez tous les ingrédients d’un potentiel désastre. Mais impossible n’est pas Mowno : à l’occasion de la dernière édition de Rock En Seine, on a réussi à se frayer un chemin backstage, sous l’ombre d’une tente, pour aller retrouver Florence, Tom, Lewis et Nick de Dry Cleaning. En 10 minutes top chrono, le groupe – à ne surtout pas étiqueter post-punk – nous a éclaboussé de sa gentillesse. Aussi de sa passion pour le fromage.

Il parait que vous aimez les choses ordonnées et que vous êtes apparemment très control freak. C’est un peu étrange de la part d’un groupe aussi difficile à catégoriser !

Tom : Nous sommes tous les quatre assez similaires sur ce point. Mais, pour moi, trop de contrôle devient synonyme de restriction. C’est là que les choses peuvent devenir difficiles et fatiguantes. C’est pour cette raison que nos compositions démarrent généralement de longs jams improvisés que l’on peaufine ensuite.
Lewis : Par contre, nous sommes dans le contrôle en tant que groupe. Dès le départ, nous n’avons pas vraiment établi de règles mais nous nous sommes tous entendus sur la manière d’utiliser les réseaux sociaux, sur notre façon d’aborder le live et le songwriting…
Nick : J’aime contrôler, mais pas en musique… Toute mon éducation musicale a été basée sur le fait de se relâcher et de laisser l’imprévu arriver.

Vous avez fait un parallèle entre les sons de votre dernier album et la fragilité de nos systèmes politiques. Dry Cleaning est donc un groupe pour anarcho-punks dépressifs et cyniques ?

Lewis : Je n’aurais pas trouvé meilleure description !
Tom : Notre musique n’est pas que pour eux mais leur convient parfaitement.

J’ai l’impression que derrière toutes ces couches de cynisme se cache justement un rayon d’optimisme. J’ai tort ?

Florence : Tu as raison… Je ne conçois pas vraiment la musique sans optimisme ou sans un certain sens de l’humour. La vie est déjà tellement morose ! J’ai souvent besoin d’écouter des trucs drôles susceptibles de me remonter le moral et auxquels je peux m’identifier.
Tom : Même le métal le plus extrême possède un certain sens de l’humour je trouve, notamment dans sa théâtralité. Et puis notre musique a beau être parfois sombre, on prend énormément de plaisir à la jouer ! On aime faire partie d’un groupe et enregistrer.

Je lis souvent que Dry Cleaning est anti-poésie. C’est vraiment le cas ?

Florence : C’est ce que disent les autres et je ne le comprends pas. Dry Cleaning est anti-beaucoup de choses mais certainement pas contre la poésie. Je ne peux vraiment pas expliquer pourquoi certaines personnes pensent cela. C’est vrai que j’écris plutôt des paroles que des poèmes, mais j’accorde beaucoup d’importance à la manière dont elles peuvent être lues sur papier. Je veux aussi qu’elles fonctionnent indépendamment de leur contexte, en tant qu’œuvre écrite. Ce n’est donc pas seulement une affaire de sons.

Et le fait que vos fans sur Reddit ou Genius analysent et décortiquent toutes vos paroles, ça vous fait quoi ?

Tom : Je trouve ça fun parce que c’est exactement ce que je faisais étant gamin !
Florence : Je faisais la même chose aussi ! Je suis totalement à l’aise avec ça. C’est très plaisant de savoir que ces fans ont l’énergie de discuter de ça, et qu’ils en livrent des analyses assez précises au final alors que, derrière mes mots, il y a beaucoup références et de choses que je suis probablement la seule à connaître. Ça me comble de bonheur que les gens considèrent que mes paroles sont bourrées de sens parce que c’est le cas. Je suis toujours déçue quand quelqu’un pense que mes textes sont juste un alignement de trucs aléatoires et sans rapport les uns avec les autres.

Quelle est la pire description de votre songwriting que vous ayez entendu ou lu ?

Lewis : Anti-poésie !
Florence : Pour être honnête, je ne lis pas beaucoup de choses sur le groupe.
Nick : Post-punk ! C’est la réponse évidente.
Tom : Les journalistes musicaux s’attachent beaucoup à catégoriser les choses. Moi, je n’ai jamais été dans un seul groupe dont les membres aient abordé la musique par le biais d’un genre précis, qu’il s’agisse du post-punk ou d’un autre. Il faut commencer à jouer librement, en discutant éventuellement des influences de chacun, mais sans prendre un style particulier en considération.
Florence : Je pense que cette affiliation post punk nous a quand même aidé d’une certaine manière. Dans les conversations, certaines personnes nous citent aux côtés d’autres, ce qui est indéniablement un atout. Beaucoup ont entendu parler de nous ainsi, mais c’est très réducteur. Je ne connais pas de musiciens qui soient à l’aise avec l’idée d’être casé dans un genre musical précis. C’est bizarre.
Lewis : J’aime les groupes auxquels on nous associe même si, tout comme nous, ce n’est pas tout à fait juste de les qualifier de post punk. Je pense à black midi, Black Country, New Road, Squid… C’est quand même génial de voir à quel point chaque groupe sonne différemment.

Tom, ton jeu de guitare est absolument fantastique et primordial au sein de Dry Cleaning. Tu ressens de la pression quand tu dois trouver des riffs à la hauteur de ceux que tu as déjà composé ?

Tom : Pas vraiment… Je suis surtout aidé par le fait de jouer dans un groupe où tout le monde est bon. Ca me rend plus confiant et me place dans un contexte favorable. On a aussi une façon très relax de jouer parce qu’on ne fait que jammer… On joue parfois des trucs débiles pendant 5 ou 6 minutes avant de se mettre vraiment au travail, comme s’il fallait qu’on se mouche et qu’on se libère les bronches avant d’attaquer. J’ai toujours joué de la guitare pour prendre mon pied, me relaxer. Pour moi, ce n’est pas un travail, c’est tout simplement ce que j’aime faire…

Florence, tu as déjà fait part de ta frustration à ne pas pouvoir répondre ‘le fromage’ quand on te demande ce qui a le plus d’influence sur ta musique. Je te laisse une chance cette fois-ci : quel genre de fromage ?

Florence : Le parmesan est mon fromage préféré ! Je sais que je suis en France et que je devrais probablement choisir autre chose mais je me dois être honnête… J’aime le brie aussi. Allez, je choisis le brie pour cette occasion particulière ! Je me rappelle de cette réponse improbable d’ailleurs. On était en pleine promo et on faisait interview sur interview. On me demandait toujours mes influences… C’est une question tellement compliquée et étrange, à laquelle je ne sais jamais quoi répondre exactement. Surtout que je ne veux pas paraître plus cool que je ne le suis en choisissant des trucs obscurs et intéressants. C’est difficile de prendre du recul sur ta vie et de savoir précisément ce qui est entré dans ton cerveau et qui a nourri ton art. Donc, oui, le fromage est une bonne réponse !

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