On y était ! Retour sur La Route du Rock 2019

On y était ! Retour sur La Route du Rock 2019

C’est une tradition : à la mi août, depuis bientôt 30 ans, La Route du Rock s’impose comme le festival incontournable pour les amateurs d’indie rock. Souvent chahuté pour son organisation ou pour sa programmation parfois jugée trop facile et répétitive, l’événement affichait – pour son cru 2019 – un line up à faire pâlir bon nombre de concurrents sur le territoire. C’est bien simple, à y regarder de plus près, seul le Check In Party (plus au Sud, dans la Creuse) pouvait se targuer d’être aussi aguicheur que le rassemblement malouin. Têtes d’affiche, révélations confirmées et talents de demain se sont donc relayés sur les bords de la Manche, devant 32 000 personnes qui ont certainement ramené de bons et beaux souvenirs avec elles.
Parce qu’il y avait à faire et à voir du côté du Fort Saint Père les 15, 16 et 17 août derniers. Trois jours pendant lesquelles la météo s’est finalement montrée plus clémente qu’annoncée, réservant sa pluie diluvienne pour le dernier soir seulement. Un détail qui a eu son importance pour certains mais qui n’a pas semblé perturber les habitués, tous rodés à l’humidité légendaire et prévisible du festival. Mais La Route du Rock a d’autres atouts. Des concerts sur la plage de Bon Secours jusqu’à l’exposition New Wave de Pierre René-Worms en passant par l’inimitable conférencier Christophe Brault venu partager sa passion pour le punk, le post punk et la new wave, la musique – et plus particulièrement le rock – était une nouvelle fois au dessus de tout lors de cette édition 2019. On vous raconte.

JEUDI 15 AOUT

Partager certains de ses musiciens avec la tête d’affiche impose un certain délai entre deux performances. C’est pourquoi Pond s’est chargé d’ouvrir le bal dans l’antre du Fort Saint Père, et a du – de fait – faire face aux approximations qui vont de pair. Mais, malgré un son perfectible en façade, la bande de Nick Allbrook a parfaitement fait le job à grands renforts de riffs léchés, de belles montées psychédéliques et de mélodies entrainantes. Mention spéciale au petit clin d’oeil à Bashung et son Osez Joséphine… De quoi se mettre en jambe en attendant une des révélations rock de cette année 2019 : Fontaines D.C. Durant une demi-heure seulement, les irlandais ont opté pour un set frontal, privilégiant les morceaux les plus énergiques de leur premier album Dogrel. Et si leur charisme nonchalant a encore devant lui une belle marge de progression, il n’enlève rien à des compositions appelées – pour certaines – à devenir des classiques. Autant dire qu’il revenait plus que jamais à Idles de lancer pour de bon les hostilités. Et cela, aucun doute que le quintet sait faire. Avec deux guitaristes aussi à l’aise dans le public que sur scène, et un chanteur aussi possédé que généreux, le groupe anglais a pioché dans ses deux premiers albums, provoqué un pogo d’anthologie, et clôturé un concert mémorable avec Rottweiler, bien aidé par les potes de Fontaines D.C. Définitivement une machine de guerre.

La suite fut moins bruyante mais toute aussi mémorable pour les fans nostalgiques de Stereolab, parmi lesquels Etienne Daho lui aussi dans la foule. Si l’émotion a dominé en début de concert et que le son a mis quelques morceaux pour se trouver, la transe krautrock de Laetitia Sadier et Tim Gane a fini par s’installer et faire danser une assemblée tout sourire jusqu’au classique Lo Boob Oscillator achevé. Idéal pour se mettre dans l’ambiance Tame Impala. Pourtant, les stars de la soirée n’ont pas fait l’unanimité. Si les fans ont salué la classe, le groove et l’efficacité pop du groupe de Kevin Parker, une autre frange de festivaliers n’a pas pu cacher longtemps sa déception devant la platitude et la froideur de la performance une fois lâchés les confettis de l’entame Let It Happen. On se consolait alors avec l’electro élégante, subtile, évolutive et parfaitement maitrisée de Jon Hopkins, puis avec le phénomène Black Midi. Entre math rock, noise et post hardcore, ces quatre jeunes anglais sans concession ont martyrisé leurs morceaux dans une cacophonie voulue, jusqu’à la limite du digeste, et aux risques qui vont avec.

VENDREDI 16 AOUT

Le gros morceau du festival déjà passé, la suite s’annonçait un cran en-dessous. Et en ce vendredi, c’est plutôt la découverte qui a dominé le débat. D’abord tout en douceur avec l’indie folk léché et bien en place de Foxwarren, au sein duquel évolue un certain Andy Shauf, les cheveux désormais coupés en quatre. ‘Elle est ou ta p’tite gueule d’amour Andy ? C’est quoi cette allure de pompier du Texas ?’ Le breton ne manque pas d’humour. Plus tard, sous le crachin breton, White Fence cachait bien sa joie d’être de la fête, ramait un peu pour convaincre, mais finissait par faire le job après un début de concert particulièrement poussif. Tout le contraire d’Altin Gün et de sa pop psychédélique stambouliote qui se sont accaparés le titre de révélation du festival. Porté par un son parfait et une belle énergie communicative, le groupe a sans mal embarqué l’assistance bretonne dans un grand moment de partage, grâce notamment à l’efficacité de ses compositions rythmées et dansantes.

La voie était alors toute tracée pour Hot Chip. Fort d’un concert extrêmement bien ficelé (même si parfois un tantinet putassier), le collectif a laissé parler l’efficacité de ses enchainements, et gagné définitivement l’empathie du public avec la montée sur scène de quelques enfants. Clin d’oeil aussi à sa reprise particulièrement réussie du Sabotage des Beastie Boys. Une fois le flop Crows subi, la danse reprenait le pouvoir grâce aux 2 Many Dj’s venus remplacer Beirut. Fidèles à leur réputation, et grâce à leurs enchainements de gros tubes et de perles indie, les frères Dewaele ont maintenu le public éveillé jusqu’à l’autre claque de cette édition 2019. Eux aussi habités par une impressionnante énergie communicative, les passionnants Crack Cloud ont fait parler leur rock intense et tendu, quelque part entre Gang of Four et Talking Heads, jusqu’à emballer les coeurs à la quasi unanimité.

SAMEDI 17 AOUT

Une fois n’est pas coutume, c’est donc sous la pluie promise que s’est achevée La Route du Rock 2019. Magnetic Friends et Hand Habits snobés, c’est Deerhunter qui ouvrait notre dernière ligne droite avec une setlist dont les fans rêvaient secrètement. Loquace, même drôle alors que d’ordinaire plus taiseux, Bradford Cox a fait la part belle à Halcyon Digest, album phare du groupe servi ici par un gros son qui lui a parfaitement rendu hommage. C’est donc un poil embrumés que nous pivotions vers Pottery et son post punk mélodique tombant à point nommé pour requinquer les rêveurs. Convaincants, les montréalais ont fait mouche et contribué sans mal à rendre secondaires les caprices météorologiques en y allant même de quelques titres inédits particulièrement prometteurs.

Sans qu’on le sache, on venait alors de vivre les derniers bons moments de cette édition. Car bien qu’appliqués, sympathiques et séduisants, The Growlers n’ont pas réussi à nous emmener jusqu’à la dernière note de leur concert, leur pop ensoleillée étant plus logiquement taillée pour les couchers de soleil que pour les nuits noires. Dans leurs pas, Metronomy a eu beau démarrer sur les chapeaux de roue en alignant quelques classiques, l’interprétation de son nouvel album a fait retomber le soufflet pour de bon. Inquiétant alors que Metronomy Forever n’est pas encore sorti… Ne restait donc plus que la traditionnelle chenille, qui fêtait ce soir là son cinquième anniversaire, pour braver le pluie, nous arracher les derniers sourires, et nous laisser rêver pendant un an à un trentième anniversaire que La Route du Rock est certainement déjà en train de nous préparer aux petits oignons.

Photos : Mathieu FOUCHER (site/Facebook)

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