12 Mar 10 Rocé – « L’Être Humain & Le Réverbère »
Album
(Big Cheese)
08/03/2010
Hip hop français d’avant
Il y a le rap français qu’on consomme, et celui qu’on déguste. Inutile de vous faire un dessin: Rocé est de ces grands chefs qui préfèrent prendre le temps de concocter des festins de roi plutôt que d’aligner les menus best of prémâchés. Et pour cause, comme l’illustre parfaitement chacun de ses albums – notamment le dernier « Identité En Crescendo » et sa pléthore de musiciens free jazz – le bonhomme dégueule de respect pour son art quand les autres se contentent seulement de « faire le taf ». « L’Etre Humain et Le Réverbère » perpétue la tradition, reflète même la passion de Rocé pour les sons old school, ceux pour lesquels il vouait déjà une grande passion à l’écoute de Radio Nova au début des années 90.
« Voici le retour du rappeur à l’ancienne (…) Les rappeurs veulent trouver la rime, moi j’ai trouvé le stock » dit il dans « Jeux d’Enfants ». Le décor est planté. Aussi à l’aise dans ses souliers de Mc conscient que dans ceux d’un artisan de la production, le parisien ramène illico les égarés aux basiques du genre, à cette époque ou les textes prévalaient sans pour autant que la musique en paye le prix (« Au Pays de l’Egalité »). Ici, point de batailles d’égo, pas de revendications adolescentes, encore moins de fausse poésie, y compris quand il se risque à reprendre Jacques Brel (« Les Singes »): à grands coups de samples et de justes réflexions sur des sujets aussi divers que l’ouverture aux autres (le titre éponyme), la quête de la célébrité (« L’Objectif »), le poids du doute (« Des Questions à Vos Réponses ») et la soi-disant égalité dans notre société (« Le Cartable Renversé »), Rocé dessine sa nouvelle oeuvre en choisissant les mots avec la même minutie que les sons.
« Ainsi, « L’Etre Humain et Le Réverbère », à mille lieux des discours convenus, s’écoute comme on lit un bouquin, s’ajoute aux « moyens de locomotion immobiles » auquel le Mc fait allusion dès l’excellente entame « Carnet De Voyage d’Un Etre Sur Place ». Fort de ses idées bien arrêtées, et sans la moindre volonté de répondre aux attentes d’un public habitué à ce qu’on lui serve ce qu’il veut bien entendre, Rocé l’éclaireur plutôt que le moralisateur continue d’avancer humblement en marge d’une scène qui, à la différence de La Rumeur ou Oxmo Puccino avec qui il tient désormais la comparaison, se cherche dans le fracas et le superficiel sans jamais se (re)trouver. Un grand disque qui n’en a pas l’air.
Julien
Posted at 21:38h, 19 marsRocé.. Oxmo Puccino , Hocus Pocus… le rap français semble avoir un bel avenir, et depuis quelques années renait de ces cendres!
upup
Posted at 11:32h, 24 marsHocus Pocus? Ils ne parlent de rien, ils sont en dehors de leur époque, de leur contexte, leur son est commun au possible, c’est un cliché de « Hip-hop »: Ils miment le hip-hop new-yorkais des 90’s, c’est juste propre…. Quel rapport avec ROcé?
En tout cas très bon album, meilleur que le précédent même. Moins inutilement perfectionné, plus cash, toujours bien écrit. Il avait tendance à privilégier l’écrit et la technique musicale au flow et à la fluidité de l’ensemble. Son dernier album (les texes étaient passionnant au demeurant) ressemblait plus à un bouquin qu’à un disque de rap, c’est rectifié. Avec talent!
Joana
Posted at 17:05h, 18 maiRoçé en concert le 22 mai au Marché Gare (Lyon)