22 Mai 10 Reflection Eternal – « Revolutions Per Minute »
Album
(Blacksmith)
18/05/2010
Hip hop
Il aura fallu dix ans pour que Reflection Eternal, association de Talib Kweli et Hi-Tek, daigne enfin offrir un successeur à « Train Of Thought« , considéré aujourd’hui comme un classique que tout b-boy doit posséder dans sa discothèque. Pour autant, refroidi par un succès commercial mitigé, loin d’égaler celui du « Blackstar » de Kweli et Mos Def sur lequel le beatmaker de Cincinnati officiait déjà, les deux ont préféré se mettre en veille pour mieux se consacrer à leurs carrières respectives. Une décennie plus tard, « Revolutions Per Minute » sonnera t-il l’heure de la revanche?
Respectés chacun dans leur domaine, ce n’est certainement pas après la légitimité qu’ils courent, plutôt après la vraie réussite: une reconnaissance plus large que celle du seul milieu hip hop. Mais n’étant pas du genre à vendre leur âme au diable, c’est sans compromis qu’ils continuent leur odyssée en commun. Et si Hi-Tek édulcore sa production, ce n’est clairement pas dans l’optique d’en faire un produit formaté. « City Playgrounds » ouvre ainsi les hostilités dans le dépouillement complet, un clavier habillant un beat downtempo du meilleur effet qui laisse le champ libre au Mc de Brooklyn au flow incomparable et toujours aussi précis. Une parfaite entrée en matière qui présage bien la volonté affichée d’épurer tout au long de cet opus, confirmée plus tard par « In The Red » et « Got Work ».
Mais on notera également un hétéroclisme affirmé et moins habituel dans la composition d’Hi-Tek, variant les ambiances plus souvent qu’a l’accoutumée: 60’s quand ils invitent Estelle sur « Midnight Hour », presque rétro-rock pour « Get Loose » feat Chester French, carrément dirty-south avec « So Good », ou jazz sur le subtil « Just Begun » feat Jay Electronica, J Cole et Mos Def. C’est pourtant quand ils reproduisent des schémas plus attendus, mais au combien efficaces, qu’ils nous séduisent. Avec « Ends » Feat Bilal, « Lifting Off », « In This World » ou le magique « Ballad Of The Black Gold », voilà de quoi alimenter nos platines pendant quelques mois de pures productions hip hop, léchées, sans fioriture et pleines de musicalité.
Le grand public adhérera t-il à ce nouveau projet? Rien n’est moins sûr tant il est trop éloigné d’un mainstream qui leur aurait certainement ouvert des portes. Néanmoins, on ne peut que se réjouir de ce parti pris artistique et apprécier cette simplicité, cette fidélité à un style qui leur va si bien. Ils réalisent un beau pied de nez à ceux qui, pour rechercher la gloire, se trahissent eux-mêmes et plongent dans la médiocrité. Fiers et biens droits dans leurs baskets, Talib Kweli et Hi-Tek assurent leur résurrection.
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