Youth Lagoon – ‘Rarely Do I Dream’

Youth Lagoon – ‘Rarely Do I Dream’

Album / Fat Possum / 21.02.2025
Indie pop

Pour avancer, il faut savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. L’adage convient parfaitement à Youth Lagoon qui n’hésite pas à utiliser dans ce nouvel album des voix attachées des anciennes vidéo familiales pour créer une pop unique et réjouissante, de plus en plus maîtrisée et solaire. Car depuis les sombres années de confinement, Trevor Power s’amuse. Revenu chez lui dans l’Idaho en 2020, moralement au fond du trou, c’est là, il y a deux ans, au milieu des sons et des décors de sa jeunesse, qu’il redonne un sens à son projet avec Heaven Is A Junkyard, épure folk qui nous laissait penser que les collages électroniques et les distorsions sonores faisaient partie du passé. Rarely Do I Dream est-il la suite de cette introspection ? Bien mieux : il est la synthèse de ce qui fut et de ce qui vient, du fruit de la compréhension de ses origines par l’artiste mis devant la réalité des images super 8 de son enfance, et de son envie de la réinvestir en carburant de sa création.

Sans replonger dans la magie noire du quasi ingénieur du son qu’il était sur ses deux premiers disques, on retrouve un Trevor Power se délectant d’alliances savantes entre les machines, les guitares (pour la dominante pop) ou le piano (la dominante ballade), se permettant également une inclusion de cuivres renversante sur Canary, faisant de Rarely Do I Dream un album dense, cohérent, et inclassable. Youth Lagoon nous y promène à l’envi entre toutes les formes de pop, trip hop, synth pop, dream pop, psyché pop, au gré de son inspiration, laissant les saynètes vocales imposer le rythme, la couleur, l’ambiance. Certes, on peut parfois se perdre et trouver l’album inégal. C’est vrai que l’intro au swing gentiment saturé de Neighborhood Scene puis Speed Freak laissent espérer plus d’ampleur que le très recueilli Football qui suit, mais on semble détecter une narration, l’envie d’une transition vers des guitares très sophistiquées accompagnant les histoires de diables, de voleurs, d’aventuriers qui parcourent ensuite cette nouvelle salve.

Trevor Power ne se contente pas de sublimer les témoignages de son enfance : il s’appuie dessus pour réinventer le présent, inventer de nouvelles histoires, les distordre et, les colorisant, les faire déborder de leur simple signification. Ainsi va la mémoire : quand nous l’assumons enfin pleine et entière, elle peut nous porter jusqu’à des hauteurs infinies. Parfois difficile à suivre, le propos joyeusement mélancolique de l’album ressemble à un jeu d’enfant. Il possède un pouvoir de catharsis incomparable. On n’essaie pas de comprendre Speed Freak, Perfect World ou Canary, mais on sait que ce sont trois perles incroyablement subtiles, parmi les plus beaux titres de cette année. Et que ces trois perles sont sur l’album référence d’un artiste apaisé, libre et inspiré, au sommet de son art.

VIDEO
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A ECOUTER EN PRIORITE
Speed Freak, Perfect World, Canary

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