Yellow Ostrich – ‘Soft’

Yellow Ostrich – ‘Soft’

Album / Barsuk / 23.04.2021
Indie pop

Qu’est-ce qu’un homme bon ? Voilà la thèse qu’Alex Schaaf – aka Yellow Ostrich – expose au fil des dix ballades apaisées de son nouvel album, le bien nommé Soft. A contrario des tendances vindicatives et cancelleriennes, ou des glapissements des terriens trop longtemps enfermés, ce caméléon introverti a profité de ces dernières années pour observer  ses contemporains et essayer de construire des liens. Soft est plus qu’un témoignage, c’est sa façon d’aimer.

Pour aider ceux qui auraient perdu de vue sa production, Alex Schaaf a eu la bonne idée, en quelques semaines, de sortir Like A Bird, une compilation couvrant dix ans de projets, et de rééditer Mistress, album référence de Yellow Ostrich paru il y a dix ans. Il y avait de bonnes raisons d’avoir oublié ce groupe à géométrie variable, dont il est le seul permanent : Yellow Ostrich hibernait depuis sept ans, son leader multipliant les compagnonnages, le plus significatif étant ses piges auprès de The Tallest Man On Earth, avant de créer Human Heat, influencé au choix par Bill Withers, Caribou, James Blake ou Bon Iver, de l’aveu même de Schaaf.

Comparé aux précédents albums, Soft s’éloigne de la pop très disciplinée et des percus tribales structurantes de ses prédécesseurs pour des rivages beaucoup plus mélancoliques, des mélodies fluides et classiques servies par des musiciens experts en la matière : le batteur Marian Li-Pino (La Luz), le  guitariste Mike Noyce (Bon Iver, Tallest Man on Earth), son comparse de toujours Jon Natchez (David Byrne, The War on Drugs, Father John Misty, Beirut…) ainsi que l’ingénieur Zach Hanson (Bon Iver, Gordi, Whitney, Waxahatchee, Hand Habits) pour finir de donner la couleur.

Si l’atmosphère est pénétrée, la voix traînante (parfois lassante), savamment à l’équilibre entre folk et pop, Alex Schaaf dément vouloir s’abandonner parler à nos émotions. La mise en avant de la batterie et une électrification toute superficielle apportent densité et vibrato sur les titres les plus clairement pop (Body Of Mine, Julia, Last Summer), et gagnent en grain sur Unlikely Skies. Les machines sont également présentes, tout aussi discrètes et efficaces : John est une ballade imparable soutenue par un clavier minimaliste, et Too Much Love ferme l’album avec sa boîte à rythme tranquillement obsédante, glissant doucement dans des interférences rédhibitoires.

Soft est un album qui soigne ses maux (ses mots ?) en faisant attention à tous les effets. C’est la grande intelligence de Schaaf que de choisir d’en faire le minimum pour en dire le maximum, à l’image de ses textes qui explorent les limites infranchissables nous empêchant de connaître les autres, interrogent avec vulnérabilité et tendresse nos identités, et tentent de faire de cet inconnaissable la base même de notre communauté. Une empathie bienvenue sous le soleil des égotismes.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Julia, John, Last Summer, Unlikely Skies, Too Much Love


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