21 Août 24 Why? – ‘The Well I Fell Into’
Album / Waterlines / 02.08.2024
Indie
Why? n’occupe plus le haut de l’affiche comme ce fut le cas au tournant des année 2000-2010 quand, encensée puis décriée par les critiques les plus prescripteurs, la formation des frères Wolf – parmi les fondateurs et artistes les plus emblématiques du label Anticon – avait dans le dos le souffle d’une hype accompagnant chacune de ses sorties. Après les claques assénées par Oaklandazulasylum (2003), Elephant Eyelash (2005) et Alopecia (2008), le groupe se serait-il perdu dans ses concepts et sa recherche de singularité à tout prix au point de revenir par la petite porte ? C’est ce que laisse penser la sortie discrète, en autoproduction qui plus est, de The Well I Fell Into, dernier venu refusant d’emblée de sombrer dans la prétention. Retour à la base donc, avec une collection de 14 titres qui ne cèdent pas au jeu des interludes ou des titres allongés sur une dizaine de minutes. Ici, Why? joue la carte de l’humilité, des structures on ne peut plus classiques, et retourne à ce qu’il sait faire de mieux : des chansons.
Les albums les plus introspectifs sont souvent le fruit d’une catharsis témoignant du mal-être de leur auteur. Et à en croire les métaphores que Yoni Wolf utilise ici en autant d’autoportraits, l’estime de soi ne semble pas être au plus haut : ‘je suis une canette de Coca aplatie par des milliers de voitures‘ chante t-il même sur The Letters, Etc. Au fond du trou diront certains, et le titre du disque – ‘Le puit dans lequel je suis tombé‘ – ne les contredira pas. Reste que, dès Marigold qui vient planter le décor d’une séparation autopsiée tout au long de l’album, Why? rappelle son haut potentiel de songwriter. Le refrain vous attrape sans vous lâcher, les arrangements sont d’une précision désarmante et la voix de Yoni Wolf est habitée comme elle ne l’avait plus été depuis longtemps. Dès l’entame, on sent que The Well I Fell Into vient des tripes, celles desquelles sont sortis les meilleurs disques de la formation, sans toutefois opérer un retour en arrière, une resucée de l’esthétique lo-fi des débuts. La production est feutrée, presque cotonneuse, y compris quand le groupe revient à ses penchants spoken word sur When We Do The Dance et ses voix pitchées vers le grave, accompagnées par ce qui semble être un choeur d’enfants.
Harmonisation des voix, jeux de percussions, fascination pour les sons tactiles, authenticité de la production, alternance des humeurs… Tout ce qui a fait les grandes heures de Why? se retrouve au sein de ce The Well I Fell Into où les auteurs voient de nouveau leur virtuosité pactiser avec leur versant mélancolique, tout en allant cette fois bien au-delà de leur coolitude caractéristique. Et cette figure du quadra nouveau, revenu de tout sauf de ses détresses existentielles, sied particulièrement bien au quatuor de Cincinnati qui, sur le titre de fin, va jusqu’à renforcer ses accents folk et y ajouter une pointe de jazz. A l’aube de sa troisième décennie, Why? prend ainsi ses distances avec son pendant plus juvénile et branchée, et décuple notre enthousiasme au fur et à mesure qu’on l’écoute. De quoi piquer l’impatience de le revoir sur scène, là ou il a toujours excellé.
Photo : Jacquelyn Johnson
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