Vieux Farka Touré & Khruangbin – ‘Ali’

Vieux Farka Touré & Khruangbin – ‘Ali’

Album / Dead Oceans / 23.09.2022
Blues psyché

Trippy, chill, smokey, cheesy… Allez savoir pourquoi, les adjectifs qui nous viennent à l’écoute de cet album hommage de Khruangbin et Vieux Farka Touré, sont essentiellement des mots anglais. Peut-être parce que la patte du trio vient américaniser l’ensemble. Le son d’Ali, en effet, se rapproche davantage de celui du groupe que des productions du fils Farka Touré. Pas étonnant puisqu’il est produit par Steve Christensen qui suit les texans depuis leur premier opus.

Khruangbin aime les collaborations, comme en témoigne l’excellent diptyque d’EPs enregistrés avec le chanteur soul Leon Bridges ces deux dernières années. Là déjà, le son était celui – si américain – du trio, marqué par quelques caractéristiques fondamentales comme le tempo lent, les accords joués au doigt et au ralenti, la caisse claire frappée sur le côté et enrobée d’une longue reverb, la passion pour la pédale wah-wah, et une belle delay générale, histoire d’inviter l’auditeur à s’enfoncer un peu plus profondément dans son fauteuil.

Cette signature sonore du trio, on la retrouve inchangée sur Ali, et elle nous conduit à cette suite d’anglicismes qualificatifs. Une atmosphère générale enfumée, confortable, embrumée et relax, donc. Une invitation, là encore, à tamiser les lumières et voir s’il reste un truc à fumer. Les voix elles-mêmes, pourtant mises en avant chez le père, sont traitées avec distance, distillant les lignes de chant par vaporisations successives dans l’atmosphère. La wah-wah sur les riddims de guitare et sa sonorité quasi aquatiques vient sceller le coté tropical et moite de l’ensemble. Décidément, on est plutôt bien dans ce canapé.

Ali est donc un ensemble de reprises tirées de l’ensemble de la discographie d’Ali Farka Touré. Du choix des morceaux du père, ils font un album très uni, une longue autoroute paisible qui s’ouvre sur Savanne pour se conclure par Alakarra. Ici, le groove de la formation texane se marie très bien au jeu de guitare du fils, à tel point que le nouveau quatuor semble fait pour jouer ensemble, confirmant les grandes qualités d’accompagnement de Khruangbin, comme c’était déjà le cas avec Leon Bridges. Évidemment la comparaison de certains titres avec les originaux peut jouer en légère défaveur des nouvelles interprétations. En effet, si Ali est clairement un album aussi planant que confortable, certains des titres repris – tels Tamala (orthographié Tamalla sur l’album de reprises) Mahini Mi (Mahine Me) ou encore l’invraisemblable duo avec Ry Cooder , Diaraby (Diarabi) – viennent nous rappeler d’une manière assez oedipienne que papa est inégalable et intouchable.

Cet album collaboratif, on l’aura compris, n’atteint pas les sommets de métissage d’un Talking Timbuktu, vertigineuse envolée et mélange de langages musicaux accédant à des pics infranchissables. Il n’en recèle pas moins une triple richesse : permettre à certains novices d’accéder à la musique d’Ali Farka Touré, confirmer les qualités indéniables du trio texan quand il s’agit de réinterpréter des titres ou de marquer de son sceau une collaboration, et nous rappeler qu’on ne s’est vraiment pas planté dans l’achat de notre fauteuil.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE

Savanne, Diarabi, Hali Hala Habada


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