10 Jan 21 Viagra Boys – ‘Welfare Jazz’
Album / Year0001 / 08.01.2021
Post punk expérimental
2021 démarre sur les chapeaux de roue puisqu’on a déjà droit à une invasion du Capitole, mais surtout au nouvel album de Viagra Boys. Et dire que Welfare Jazz était attendu est l’euphémisme du siècle tant, depuis la sortie de leur premier effort Street Worms, les suédois proposent une recette magique de post punk infusé de jazz qui captive un public toujours plus nombreux. A six, on peut faire beaucoup de bruit. Mais quand par-dessus le marché on a derrière le micro un type aussi charismatique que Sebastian Murphy, le potentiel agressif est multiplié exponentiellement. Welfare Jazz a des allures d’album expiatoire et voit le groupe accroître sa palette de styles en y incluant des influences country et synth pop. C’est un manifeste de vulnérabilité et d’acceptation de soi, conservant dans son essence même l’humour et la légèreté habituels de Viagra Boys.
Ain’t Nice, le titre introductif, résonne déjà comme l’hymne successeur de Sports. Une cacophonie punk où Murphy dégoise sa misanthropie à la face du monde, sur une ligne de basse redoutable. Le clip à lui seul vaut aussi son pesant de cacahuètes. On y voit le chanteur déambuler dans les rues de Stockholm, en semant sur son passage un chaos royal. Ce flirt avec les tendances destructrices – ainsi que les efforts pour changer et devenir une meilleure personne – sont les thèmes centraux de l’album. Le leader des Viagra Boys connaît bien cette spirale d’autosabotage et se livre au sujet de ses anciennes erreurs et addictions : sur l’introspectif et intimiste Into The Sun, il y va de sa garantie ‘Now that I can see everything, the way that it was, I would do anything to take back the things I have done‘ tandis que sur I Feel Alive, il joue le crooner et s’autocongratule par rapport à sa sobriété retrouvée (‘I haven’t felt like this in quite a while / Feel like a new man, yeah, such a better guy‘). Niveau discours d’encouragement et coup de pied au cul de motivation, difficile de faire mieux. Pour autant, l’humour absurde qui caractérise le groupe depuis ses débuts est toujours aussi présent. Qui d’autre que Viagra Boys pour oser les spoken-words This Old Dog et Best In Show II, ou le survolté Secret Canine Agent ? Murphy partage encore une fois son obsession étrange pour les compétitions canines et… les crevettes. Chacun ses manies.
On ne change pas une équipe qui gagne : Oskar Carls et son saxophone font toujours des merveilles et contribuent en grande partie à l’énergie galvanisante de l’album. Il élève chaque morceau qu’il touche, particulièrement Girls & Boys et son beat disco incendiaire. Lorsque l’instrumental 6 Shooter part dans une sorte de bœuf improvisé à grands renforts de saxo, de klaxon, de séquence électronique et de samples chelous, mon moi intérieur féru de free jazz bondit d’allégresse. Si seulement les gaillards poussaient encore plus loin le bouchon de l’expérimentation, au risque de s’aliéner une grande partie du public, je serais le plus heureux des hommes.
Viagra Boys ne propose certes pas une révolution dans le son, mais les suédois s’amusent quand même à déstabiliser l’auditeur avec de surprenantes influences. Pièces à conviction : le synth pop Creatures et particulièrement l’incroyable titre country In Spite Our Ourselves, cover du regretté et génial John Prine. Ce morceau concluant Jazz Welfare – avec en guest la chanteuse Amy Taylor du groupe Amyl and the Sniffers – remplace la tendresse folk de la composition originale par une ambiance lo-fi angoissante.
Viagra Boys met d’ores et déjà la barre très haute concernant les sorties musicales de l’année. Ce n’est pas vraiment une surprise puisqu’on n’en attendait pas moins de ce deuxième album. Il est agréable et même réconfortant de constater que le groupe garde une certaine radicalité, sans tomber dans la caricature des affreux jojos du post punk crasseux. Il y a quelque chose de Devo et des Stooges chez lui ; et c’est bien là le meilleur compliment qu’on puisse lui faire.
A ECOUTER EN PRIORITE
Ain’t Nice, 6 Shooter, I Feel Alive, Girls & Boys, In Spite Of Ourselves
Ludwig le commentateur
Posted at 14:15h, 05 févrierAlbum Phénoménal; très éclectique.
Merci à MOWNO pour la dévouverte.
9a doit etre un très bon groupe de scène qui plus est.
( ils ont un son assez « live »/prise directe »)