Vanishing Twin – ‘Afternoon X’

Vanishing Twin – ‘Afternoon X’

Album / Fire / 06.10.2023
Art rock expérimental

Lorsque l’on aime un groupe, que ce soit pour une poignée de titres bien sentis ou pour une carrière plus dense et prolifique, il est de coutume de le retrouver avec une certaine tendresse si d’aventure le vent se mettait pour lui à tourner et à semer des embruns sur son inspiration. On pardonnera volontiers une direction moins convaincante, des morceaux moins captivants ou un disque surfant sur le fantôme d’un autre si, par le passé, la force émotionnelle de sa musique nous a, ne serait-ce que l’espace d’un instant, dominé. Pourtant, en retrouvant aujourd’hui Vanishing Twin avec ce nouvel album – le cinquième en huit ans –, difficile d’adopter une autre attitude que celle du désarroi, de la déception, de l’incompréhension. Un disque déconcertant, mais pas dans le sens de ceux qui nous questionnent, nous intriguent, nous fascinent par leur complexité ou leur virage à 180°. Plutôt de ceux qui nous laissent pantois, face à une œuvre unidimensionnelle, parsemée de fausses bonnes idées et de serrures en toc.

Après le chef d’œuvre que constituait The Age Of Immunology et le tout aussi convainquant Ookii Gekkou, difficile de comprendre ce qui a pu mener à cet effort qui, s’il reprend bien les codes et l’ADN du groupe, ne mène ici qu’à des impasses formelles et artistiques. Avec son absence de direction, sa temporalité maltraitée, son rythme qui se cherche sans jamais parvenir à se trouver et ses bidouillages sans queue ni tête, Afternoon X pose la question du fragment, de l’idée préfigurant l’acte de construction, des choix que doit effectuer l’artiste au profit de la pertinence et de la cohérence. Car force est de constater ici qu’aligner bouts de mélodies hasardeuses, harmonies approximatives et mixage bâclé ne suffit (évidemment) pas à créer de vertiges ni de climax dignes de ce nom. L’ensemble privilégie l’utilisation d’outils et d’effets à outrances en en (ab)usant dès son ouverture avec une certaine froideur, là où ses prédécesseurs étaient marqués par une réelle touche d’humour bienvenue. Un tel abandon du discours et de la musicalité pourrait conférer à la no-wave, ou du moins à une forme de radicalité salutaire dans la dimension expérimentale et l’approche. Mais là encore il n’en est rien. Les idées qui pullulent, souvent paresseuses, ne sont pas assez franches, assumées et motivées pour s’engouffrer dans une recherche des limites pertinentes, ne s’alignant pas même sur l’autel du spectaculaire. En enchaînant ainsi les trouvailles sonores sans prendre le chemin de la radicalité, le groupe en oublie d’écrire des morceaux et passe donc à côté de son potentiel.

Et si Vanishing Twin s’était laissé cette fois-ci clairement aller à la pose ? On sauvera toutefois les parties percussives inspirées de Valentina Magaletti, seule membre de la formation qui semble surnager dans ce délire abscons avec la voix toujours impeccable de Cathy Lucas. Le titre The Down Below, en poussant au maximum le curseur de la déstructuration et de l’absence de fil conducteur, parvient presque lui aussi à s’extirper de la masse en créant sa propre logique narrative, forcément abstraite et finalement hélas (assez) inconséquente. N’oublions pas toutefois la belle surprise finale, Subito, morceau de clôture sous haute influence Stereolab, qui brille par sa sobriété, sa ligne claire et ses voix travaillées. ‘What are we waiting for ?  seront les dernières paroles du morceau, et donc du disque : une question que risque aussi souvent de se poser l’auditeur tout au long de cet étrange mais surtout bien pénible voyage.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
The Down Below, Subito


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