
17 Sep 23 Vagabon – ‘Sorry I Haven’t Called’
Album / Nonesuch / 15.09.2023
Pop RnB
C’est parce que chacun gère le deuil à sa façon qu’il y probablement autant de manières de l’affronter que d’êtres humains sur Terre. C’est malheureusement une perte douloureuse qui est à l’origine du nouvel album de Vagabon. Quand sa meilleure amie décède en 2021, le monde de Laetitia Tamko est ébranlé du tout au tout. Ce qui l’intéressait ne l’intéresse plus et elle prend conscience de la nécéssité de ressentir pleinement toutes les émotions qui se présentent à elle. Alors, elle lâche tout et part s’isoler au bord d’un lac du Nord de l’Allemagne : une pulsion naturelle de ‘vivre son malaise en privé mais également de faire face à cette nouvelle urgence’ qu’elle sentait bouillonner en elle.
De ce drame aurait pu découler un disque légitimement introspectif et mélancolique, mais l’artiste n’est pas du genre à se complaire dans la douleur. Son élan de vie est si puissant que c’est sur l’Autobahn de la lumière qu’elle s’est engagée plein pot. En résulte l’album le plus chaleureux et optimiste de sa carrière, un véritable pied de nez à la mort. En grande amatrice de dance music, Tamko a voulu ici cette veine de ‘clubs underground allemands’ où elle s’est sentie assez libre et en sécurité pour s’amuser et pleurer dans le noir, au milieu de centaines de personnes. On retrouve donc cette ambiance festive dans la majeure partie des morceaux de Sorry I Haven’t Called, dont Carpenter qui s’impose déjà comme le plus significatif de la nouvelle ère plus solaire de Vagabon.
On danse donc à ses côtés dans cette boîte de nuit moite animée par les grosses basses de You Know How et les high tempi de Do Your Worst produit par Teo Halm (Rosalia, SZA, FKA Twigs…) qui berce sa douce voix dans un drum & bass efficace. Cette voix d’ailleurs, particulièrement douce comparée aux précédents opus, on aurait presque du mal à la reconnaître si Passing Me By ne venait pas nous rappeler celle qui nous avait tant enjaillé sur Water Me Down, soulignant par la même occasion la palette vocale exceptionnelle de Laetitia Tamko. On notera néanmoins ces instants où la jeune femme touche du bout de sa voix, non pas une mélancolie, mais une douce nostalgie contemplative rappelant que la résilience et la renaissance ne sont pas qu’affaire de fête et de positivisme à toute épreuve. Les guitares sèches de Lexicon ou Anti Fuck, comme l’orgue sur Autobahn attestent qu’il s’agit aussi là de calme et de paix intérieure.
À travers le titre de ce nouvel album, Vagabon s’excuse de son absence depuis 2019 puis, via le titre d’ouverture – Can I Talk My Shit?, résolument RNB – demande l’autorisation de revenir chanter ses emmerdes. Évidemment qu’on l’accueille oreilles et bras ouverts pour qu’elle puisse nous transmettre encore un peu de sa lumière, jugée ici d’utilité publique contre la déprime passagère.
A ECOUTER EN PRIORITE
Can I Talk My Shit, Carpenter, Passing Me By, Do Your Worst
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