The Liminanas & Laurent Garnier – ‘De Pelicula’

Album / Because / 10.09.2021
Garage psychédélique

Ce serait bien mal connaitre The Liminanas et Laurent Garnier que de déclarer sans ambages que ces deux figures de la musique française n’ont rien à faire ensemble. Chacun dans leur registre, le duo perpignanais comme le célèbre producteur electro – tous biberonnés à une ère musicale que les moins de quarante ans n’ont pas connu – ont toujours fait preuve de curiosité, d’ouverture d’esprit, et se sont assez nourris de leurs rencontres respectives pour ne pas se retrouver un jour à croiser le fer en studio. Alors quand s’est présenté le remix de Dimanche – sur lequel pose sa voix Bertrand Belin, autre collaboration surprenante répétée ici sur le magnifique Au Début C’Etait Le Début  – tout s’est soudainement illuminé dans les têtes des protagonistes : il fallait poursuivre la collaboration dès que l’opportunité se présenterait, ce que les contraintes liées au Covid ont finalement permis.

S’il a été majoritairement conçu à distance, De Pelicula n’est pas qu’un album de The Liminanas, et Laurent Garnier toute autre chose qu’un simple producteur dans l’histoire. Proximité ou non, la méthode n’aurait de toute façon pas été différente dans un autre contexte, le producteur préférant s’adonner seul à son perfectionnisme, et le couple se relayant généralement au stade de la composition. Au fil de longs échanges, onze titres ont donc vu le jour, empreints de la patte finalement assez reconnaissable de chacun des acteurs, tous assez malins néanmoins pour ne pas simplement fusionner, et sombrer dans une association prévisible. Et c’est justement tout ce qui fait le sel de l’album : Laurent Garnier a beau s’être débarrassé des kicks chers à sa techno, il rayonne ici par sa façon de faire lentement évoluer l’intensité des morceaux, de cultiver l’art de la répétition (Je Rentrais Par Le Bois…BB, Steeplechase), installant ainsi une transe souvent croisée au sein du garage psyché singulier de ses hôtes.

Sans jamais lâcher un fil rouge aux consonances psychédéliques et plus globalement seventies, De Pelicula adopte la forme d’une bande originale de film imaginaire baignée d’aridité occitane (Saul pour le synopsis), au cours de laquelle le krautrock veille au loin (Juliette Dans La Caravane), ou le rock renoue avec la danse (Je Rentrais Par Le Bois… BB, Ne Gâche Pas l’Aventure Humaine) et s’octroie quelques libertés en s’envolant jusqu’à presque saisir le big beat d’une main (Que Calor !, Promenade Oblique, Steeplechase). Amateurs de vulgaire danse-rock, passez votre chemin : tout au long de ce classieux album, c’est la sauce Primal Scream et Happy Mondays qui est soudainement prise de remous, comme le langage retrouvé d’une génération de musiciens en véritable osmose, sans autre guide que le plaisir indescriptible pris à sceller le sort de leur collaboration. A défaut de se consumer en live, osons espérer sa suite en studio.