
30 Mai 25 The Budos Band – ‘VII’
Album / Diamond West / 30.05.2025
Afro funk psyché
Depuis son premier disque éponyme en 2005, The Budos Band a patiemment bâti un monde sonore à part qui fusionne afrobeat, soul cinématographique, rock psychédélique et énergie garage. Une musique instrumentale dense, toujours à la lisière du réel, qu’on imaginerait volontiers sortir d’un vieux film d’exploitation ou d’un thriller bancal de série B qu’on louait dans les vidéo clubs des années 90. Avec le bien nommé VII, son septième album (mais son premier sur Diamond West, le label indépendant fondé en 2023 par Tankel et Brenneck), le collectif new-yorkais – qu’on pensait figé dans le marbre d’un son unique – peaufine une formule qu’il a lui-même contribué à définir. Sans rompre avec ses fondamentaux, The Budos Band fait ce qu’on attend de lui : poser des cuivres possédés sur des grooves hypnotiques et des riffs brûlants.
Produits par Tom Brenneck, son guitariste, et réalisés par Simon Guzmán, (Sharon Jones, The Jon Spencer Blues Explosion, The Frightnrs…), ces onze nouveaux titres (écrits en trois jours) puisent une fois encore dans le large éventail d’influences du groupe dont on peine toujours à définir convenablement l’esthétique. ‘Nous ne jouons pas de l’afrobeat, ni du jazz éthiopien, ni de la musique du monde. Nous ne sommes pas vraiment funk, nous ne sommes pas soul. Nous ne sommes pas du rock non plus. Nous sommes juste un amalgame de tous ces sons différents, de sorte que tout cela surgisse de toutes les directions lorsque vous écoutez’, explique celui qui en parle le mieux, Jared Tankel, un des fondateurs du collectif.
Et ça se vérifie dès le cyclique et entêtant Thrice Crown qui, entre guitares fuzz rampantes et cuivres menaçants, installe une tension qui restera palpable tout du long. Une ouverture coup de poing, incantatoire, qui aurait toute sa place sur la BO du prochain Tarentino. Overlander, bande son imaginaire d’un road trip dans le désert des Mojaves, déploie quant à lui un groove lancinant et psychédélique sublimé par le percussionniste Rich Terrana échappé du combo rocksteady de Brooklyn, The Frightnrs, dont le jeu exalté, presque tribal, fait vibrer l’album avec détermination. Seul l’interlude Sharky’s Delight nous laissera un peu de répit avant que les américains ne repartent dans leur chevauchée fantastique avec Curse Of The Ivory Fang (qui rappelle le mythique Apache d’Incredible Bongo Band) et le mystérieux Behind The Black Curtain qui montre un versant plus tendu et nerveux. Sur la dernière partie du disque, notamment The Strigoi ou Mean Streets, le groupe ralentit (un peu) le tempo pour mieux installer des climats poisseux et âpres explorant une zone intermédiaire, ni festive ni franchement sombre, où VII prend toute sa consistance.
Alors bien sûr, les puristes diront qu’on est en terrain connu, que le groupe n’invente plus grand-chose. Mais c’est mal comprendre la démarche du combo new-yorkais qui transforme doucement au fil des albums sa matière sonore, et qui confirme que rien ne sert de trop en dire quand la musique parle d’elle-même. Avec VII, il rappelle qu’il reste des figures incontournables de cette soul-funk instrumentale sombre et mystique, capable de convoquer aussi bien Fela Kuti que Black Sabbath, Ennio Morricone ou Mulatu Astatke. 28 minutes furieusement vivantes et vivaces, sans artifices ni concessions, à écouter fort, de préférence sous un soleil de plomb, avachi dans un hamac avec un verre de mezcal à la main et le colt encore fumant au fond de la sacoche.
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