The Black Keys – ‘Dropout Boogie’

Album / Nonesuch / 13.05.2022
Garage blues

Evacuons tout de suite la question principale que beaucoup se posent quand un nouveau Black Keys déboule dans les bacs : non, ce Dropout Boogie n’atteint pas les incroyables sommets blues soul de Brothers, pas plus qu’il n’approche des hauteurs garage de El Camino. D’ailleurs, sans trop s’avancer, il y a fort à parier que plus jamais le duo ne sera touché par un tel état de grâce que sur ces deux disques sortis à dix huit mois d’intervalle en 2010 en 2011. Pour autant, la musique doit-elle être seulement jugée sous le prisme d’une recherche de ce qui a fonctionné dans le passé, ou sous l’aspect de la nouveauté et de la surprise à tout prix ?  Vous avez deux heures… Ou plutôt 34 minutes et 10 titres pour vous faire une idée.

Après avoir rendu hommage l’an passé aux classiques Blues du Mississippi avec leur Delta Kream – collection de reprises country hill blues enregistrées en deux après-midi seulement – les gars de l’Ohio ont choisi de reprendre fièrement les recettes qui ont fait leur succès. Du petit riff funky à souhait qui ouvre le bal (le sautillant Wild Child) au titre très Stones qui le clôture (Didn’t I Love You), on navigue ici dans des eaux parfaitement connues. Soul blues lancinant, How Long est un parfait compagnon pour cruiser sur les routes un après-midi ensoleillé, quand Baby I’m Coming Home est plutôt taillé pour les stades. Billy F Gibbons des ZZ Top a été invité pour enregistrer Good Love où sa guitare se promène tout au long de ce blues mid-tempo. A l’exception du Burn That Damn Thing Down, qui tire un peu trop sur un mauvais pastiche de JJ Cale, l’ensemble des titres ont la marque de fabrique d’une maison de qualité.

On ne sera pas non plus déstabilisé par les thèmes abordés : Auerbach nous parle toujours de ses rapports aux femmes qui lui ont brisé le coeur (et le reste aussi) mais le propos sait se faire plus critique (For The Love Of The Money), voire simplement divertissant sur Your Team Is Looking Good qui semble programmé pour accompagner l’entrée des footballeurs américains lors des futures compétitions universitaires. Enregistré dans le home studio du guitariste, l’album est extrêmement bien réalisé. Il faut dire que le sieur a eu le temps de s’exercer ces derniers temps tant il extrêmement demandé : rien que 16 productions sur les deux années écoulées, à croire que le gars aime passer son temps derrière sa console. Une pause est prévue néanmoins puisque les Black Keys seront en tournée américaine de juillet à octobre, en attendant un passage par l’Europe qui devrait suivre. En attendant, Dropout Boogie pourra accompagner votre été sur une note générale de bonne humeur, simplement agréable. D’ailleurs, la musique et l’Art en général doivent-ils forcément véhiculer des émotions ? Rendez-vous en septembre pour le rattrapage…