19 Oct 10 Teebs – « Ardour »
Album
(Brainfeeder)
18/10/2010
Dubstep transparent
Attention, invasion Los Angeles. Au milieu d’une scène dubstep et hip-hop alternative en pleine effervescence, dont le parrain s’appelle Flying Lotus, le nouveau jeune protégé de ce dernier remet sa première copie. « Ardour » deviendra sans doute une pièce essentielle enfantée par cette ville qui rejette apparemment une aura spéciale, particulièrement à travers le label Brainfeeder qui vit plus que jamais avec son temps. D’origine malawienne et caribéenne, Mtendere Mandowa aka Teebs est né à New York, et bouillonne d’ingéniosité du haut de ses 23 ans. Aussi colorée que ses oeuvres peintes, l’atmosphère radieuse qui règne sur ce disque contraste paradoxalement avec le contexte dans lequel il a été produit. Des circonstances malheureuses – entre perte d’emploi, décès du père et porte-monnaie à sec – qui l’ont d’autant plus poussé à s’évader dans ces 18 productions à découvrir pour les amateurs d’electronica éthérée et de dubstep limpide.
Teebs partage son appartement avec Samiyam, autre poulain de Brainfeeder, et on devine des inspirations mutuelles qui débouchent sur des morceaux au grain presque palpable: « You’ve Changed », mais aussi « Wind Loop » truffé de détails qui enrichissent la rythmique à notre insu, ou « Arthur’s Bird » qui avance à reculons, poussé par un beat lent mais bien consistant. Mais le jeune homme s’en sort aussi très bien lorsque l’on parle d’influences ambient, comme sur l’apaisant « Bound Ball » comme taillé au diamant, « Lakeshore Ave. » au piano hospitalier, ou « Burner » sonnant comme si on avait accroché des clochettes aux pattes d’un troupeau d’insectes. Teebs est définitivement un beatmaker doué, et parvient à construire des mosaïques de sons transparentes, imagées par les pianos miniatures qui s’accrochent à votre jambe sur « Moments », ou l’abstract hip-hop épuré de « King Bathtub », aussi fragile qu’une orange qu’on épluche avec des ongles aiguisés.
En revanche, Teebs a pour défaut de souvent s’enfermer dans la répétition quand on ne dirait pas non à de petites montées ou envolées lyriques. Cependant, « Ardour » a pour lui une (trop?) forte homogénéité, du fait notamment de la qualité constante de chacun de ses tracks. Ainsi, même s’il tient l’équilibre, le producteur marche sur un fil un peu rectiligne, défaut qui s’oublie à l’écoute du folklore scintillant de « Bern Rhythm », du poussiéreux « Felt Tip » largement inspiré par Flying Lotus pour son côté tâchant, ou du conte de fée « Double Fifths » mis sous perfusion dubstep. Le jeune talent s’applique donc énormément, assez pour qu’on ne lui en veuille pas de produire des instrus inoffensives telles que ce « Why Like This » en vol plané perpétuel, s’avalant comme on goberait un Flamby…
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