Sunflowers – ‘Endless Voyage’

Album / Only Lovers / 07.02.2020
Dream punk

Sunflowers fait décoller ce début d’année vers une destination intergalactique, nous emportant avec Endless Voyage dans un space opera singulier où sa musique prend une ampleur nouvelle. Dans cette épopée qu’on pourrait qualifier de dream-punk psychotique, les portugais s’attaquent au concept du récit fantastique, comme ont pu le faire Go!Zilla ou Lumerians ces dernières années dans un registre assez voisin. Pour ce faire, ils renouvellent leur son en profondeur : l’introduction massive de courtes nappes de claviers aériens rythment la furia binaire des guitares sur les titres chantés.

La destination d’Endless Voyage est plus à rechercher dans les introspections du High Life de Claire Denis que dans la grandiloquence hollywoodienne de Seul sur Mars : Sunflowers décrit davantage la folie pernicieuse et les manipulations ténébreuses que l’exploration scientifique, la fin du monde plus que sa préservation, et les ruptures sonores comme les rythmiques intempestives qui traversent l’enchaînement des titres ne reposent jamais l’auditeur. C’est exigeant et finement calibré. On retrouve, au-delà des références classiques du trio parmi lesquelles Oh Sees, les sophistications électroniques de Toy, l’énergie désespérée de Yak, voire leur auto-dérision : après une introduction planante, le collectif brise l’atmosphère religieuse qu’il posait, par un Forest Wind sonnant comme une musique d’ascenseur, puis enchaîne brutalement avec A Conflict Taking Place, long morceau clé de l’album, montée psyché très progressive, alternant avec justesse réverbération et saturation, soulignée d’un chant guttural scandé comme un discours martial. Puis le son retombe dans le tropical avec Dreaming Of Distant Shore. Tout au long du disque, le groupe joue avec ces variations, les nappes de salles d’attentes (Marble Gallery, Contemplation) alternant avec les sonorités garage-punk qu’on leur connaît (Dreamweaver, Oscillations).

Les portugais continuent leur méticuleux voyage sonore dans des bruits de moteurs de fusée (Endless Voyage II) jusqu’à une fin magnifique en forme de procession tribale cosmique. La musique de Sunflowers s’écoute toujours comme la BO d’un film, mais Carolina Brandao et ses compères ne se contentent plus des longs travelling sur les grands espaces américains. Avec Endless Voyage, ils se donnent les moyens de toucher le ciel.