28 Mai 24 Rendez-Vous – ‘Downcast’
Album / Artefact / 24.05.2024
Punk noise shoegaze
Ceux qui ont un peu suivi s’en rappellent : en 2018, Rendez-Vous sortait Superior State, un premier album dont le post-punk glacial couplé à des prestations scéniques haletantes allait alors l’amener à jouer dans les festivals les plus en vue. Même Les Inrocks, à l’époque, attribua aux parisiens le titre de ‘groupe de rock que la France attendait‘… Pourtant, à peine deux ans plus tard, et tout juste après avoir écumé les salles d’une bonne douzaine de pays à travers le monde, silence radio.
Annonce pour le moins improbable, donc, que celle de cette reprise soudaine des activités avec la sortie de Downcast, nouvelle salve plutôt déconcertante de prime abord, l’ADN post-punk/cold-wave du quintet ayant muté vers une sorte d’hybride mi-enragé mi-éthéré. L’entame aiw777 offre à elle seule un échantillon de cette nouvelle orientation, à savoir un punk brut aux aspérités parfois indus, alterné d’un indie rock pointant vers la bande de Franck Black. Rendez-Vous déroule ensuite un menu aux styles musicaux beaucoup plus marqués selon les titres : punk noise façon USA Nails (Sheer, Dye And Retry), heavy shoegaze évoquant instantanément l’âge d’or des Smashing Pumpkins (Downcast, Ur Cross), new wave curesque (Nothing), ou encore shoegaze rappelant les pionniers de The Jesus and Mary Chain (Smoke’Em Heads).
Malgré cette diversité, l’ensemble défile de manière étonnamment grisante et cohérente… Probablement deux raisons principales à cela : d’une part, la froideur originelle toujours présente – notamment à travers les bidouillages électroniques et les textures de guitares parfois très métalliques – appose la signature du combo à chacun des onze morceaux ; d’autre part, Francis Mallari (chant, basse) étend encore un peu plus son registre ici, va même jusqu’à titiller par moments le timbre de voix de Billy Corgan, et évite de nous faire sombrer dans la monotonie.
Avec Downcast, le groupe nous propose un voyage rétro-futuriste faisant cohabiter de manière originale les parfums nostalgiques (mais pas passéistes), du rock 90s aux textures plus agressives des glitchs et autres distorsions digitales actuelles. En somme, la parfaite bande-son pour appuyer le thème revendiqué de ce nouvel opus : ‘un exercice de retranscription de la violence du monde au mitan des années 2020, moderne par son caractère hybride, comme une lutte à mort entre l’humain et la machine – deux frères ennemis qui cherchent autant à s’étreindre qu’à s’étouffer’. Toutes guitares devant désormais, Rendez-Vous nous revient donc métamorphosé, plus incisif et envoûtant que jamais. Et, à l’heure où les formations post-punk n’en finissent plus de pulluler, on salue cette prise de risque qui en valait bien la peine.
Photo : Mickaël Liblin
No Comments