
19 Mai 25 Quinquis – ‘eor’
Album / Mute / 09.05.2025
Electro
Il y a des voyages qui dépaysent plus que d’autres. Par leurs sonorités, leurs structures, leurs fondations. Liant ici le fond et la forme, c’est avant tout la langue qui dessine les itinéraires que nous invitent à emprunter Emilie Quinquis. Après un premier album et un EP, publiés en 2022, où elle faisait déjà se rencontrer musique électronique et langue bretonne, voici un nouvel opus où se déploie, plus précisément encore, son univers singulier, à la fois dansant et onirique. Inspiré par le voyage effectué avec son mari, Yann Tiersen, sur un voilier à l’occasion d’une tournée estivale, eor (ancre) nous emporte sur des flots scintillants, parfois agités, souvent apaisés. Produits par Gareth Jones (Depeche Mode, Einstürzende Naubauten) et incluant la participation de Desire Marea et Cerys Hafana, ces huit nouveaux titres poussent loin les possibilités permises par la voix enivrante de la compositrice. Soutenues par une armada de synthétiseurs modulaires et analogiques, les fulgurances mélodiques, empreintes d’un grand lyrisme, viennent éveiller chez nous des images tantôt enfantines, tantôt fantasmagoriques – lorsque ce n’est pas les deux à la fois comme dans le magnétique et obsédant Peñseidi. La richesse des timbres et des harmonies, que ce soit au niveau des chœurs (Inkanuko) ou des instruments plus rares (les ondes Martenot sur Blaz an ohlen) permettent à l’ensemble de briller hors des esthétiques et des modes, comme une forme de nouvelle musique sacrée, rituel païen dans la lignée de Dead Can Dance ou d’Irène Drésel. Lorsque les mouvements se font plus intimistes, c’est alors la splendeur de l’épure qui transparaît, délaissant la densité de certaines couches sonores pour mieux retrouver la racine de ces compositions telluriques, fascinantes et habitées. Tout un monde, et en breton s’il vous plaît.
Photo : Titouan Massé
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