18 Nov 20 Population II – ‘A La Ô Terre’
Album / Castle Face / 30.10.2020
Psyché
Population II est le premier groupe canadien francophone signé chez Castle Face. A La Ô Terre, son premier album, outrepasse les références psyché-stoner propres au label, les musiciens poussant les explorations sonores vers les terres très 70’s du free jazz et du rock progressif, dans un voyage monstrueusement onirique où il est question de vibrations internes plus que de situations particulières, d’ailleurs, de rencontres…
Débarrassons-nous tout de suite du chauvinisme langagier : ce n’est pas pour le côté francophone qu’on se délecte de Population II. Comme dans le jeu de mot du titre, il y a quelque chose de bancal dans le chant, trop de réverbération sur une voix trop perchée et peu articulée pour être audible. Mais peu importe, le lamento indistinct ainsi obtenu homogénéise l’atmosphère psychédélique du disque, et confirme que le trio s’est avant tout fédéré autour de sa virtuosité instrumentale et son goût pour un rock épique et baroque.
La musique de Population II est en effet toute traversée d’un souffle aventureux, à l’image de deux premiers EP composés chacun de deux titres pouvant dépasser les vingt minutes. Passé Introspection – titre qui justifie à lui seul la signature chez Castle Face de par l’explosivité des guitares et les emballements rythmiques – A La Ô Terre nous emmène très loin sur les voies plus vaporeuses et expérimentales des pionniers du rock progressif, Yes, Pink Floyd ou King Crimson en tête. Le polyptyque Ce n’est Rêve-Les Vents-L’Offrande-La Nuit ressemble aux sonates rock que construisaient ces précurseurs : portée par une ligne de basse énorme, structurante et voluptueuse, la composition déploie savamment des variations oniriques propres à ce mouvement, distorsion d’un moog (Ce n’est Rêve), dialogue orgue-guitare (Les Vents), chant psalmodié (L’Offrande).
Puis Il eut un Silence dans le Ciel est ici le plat de résistance tant s’y trouvent à l’équilibre toutes les tentations du groupe : boucles, progressivité, atmosphères suspendues ou agressivité. La basse, plus en retrait, reprend son rayonnement puissant sur la fin de l’album, et offre un bel espace au déploiement de sonorités free jazz (Attraction, A La Porte de Demain), aux jams d’une guitare totalement libérée, et quelques sons de cuivre (Attraction).
L’opus se dilue enfin tranquillement dans le cosmos et l’apparente improvisation de Je Laisse Le Soleil Briller. Avec A La Ô Terre, Population II, qui tire son nom d’une façon de classer les étoiles de notre galaxie, dépoussière avec intelligence les chemins des pionniers d’un rock curieux et virtuose qui cherchait encore ses lettres de noblesse.
A ECOUTER EN PRIORITE
Les Vents-L’Offrande-La Nuit, Il Eut Un Silence Dans le Ciel, Attraction
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