
05 Oct 22 Pixies – ‘Doggerel’
Album / BMG / 30.09.2022
Indie rock
Faut-il brûler ses idoles ? Peut-on être et avoir été ? Le talent est-il soluble dans le temps ? La condition d’has been est-elle, à bien y réfléchir, préférable à celle de never was ? En quoi est-il pertinent de reprocher à l’ancienne plus belle fille du lycée, désormais dans la force de l’âge, d’avoir perdu de sa superbe ou, plus prosaïquement, d’avoir pris un peu de bide ? A chaque fois, c’est la même chose. Depuis leur dispensable reformation en 2004, chaque nouvel album des Pixies relance inlassablement les vieux débats de comptoir et autres conversations passionnées à défaut d’être passionnantes. Doggerel, le huitième LP des lutins, continuera à coup sûr d’alimenter les conversations. Le reboot des Pixies, ou comment passer de groupe que l’on écoutait beaucoup en en parlant peu, à groupe que l’on écoute peu mais dont on cause beaucoup trop.
‘You know, I know that you don’t really hate me / But I suppose that I probably irritate you‘ suivi, quelques lignes plus tard, de ‘Don’t waste your time on me‘… Dès l’introductif Nomatterday, Black Francis et ses gros sabots tendent la perche, voire le bâton, pour se faire battre. Il y a un peu plus de trente ans, Doolittle et, dans une moindre mesure, Surfer Rosa ont changé bien des vies. Certains nostalgiques diront même, un peu comme on répète un mantra, que ces deux albums ont marqué l’histoire. Au vu de tels états de service, cesser d’aimer ou, pire encore, commencer à détester le bonhomme s’avère impossible. Cependant, et depuis l’inutile brelan post-résurrection Indie Cindy / Head Carrier / Beneath The Eyrie, le bostonien a sérieusement tendance à hérisser le poil et courir sur le haricot. Aucun retournement de situation n’est malheureusement à attendre de Doggerel qui, tout en restant digne, ne parvient qu’à sauver les meubles et préserver les apparences. Même si cuisinée par un chef étoilé, le gourmet habitué aux festins pourra difficilement se satisfaire d’une salade d’endives. Le soin apporté au dressing ne fera jamais oublier l’absence de goût et couleur du chicon.
L’illusion, et c’est d’ailleurs un lieu commun, ne vaut que si elle est entretenue. A ce titre, Vault Of Heaven, Dregs Of The Wine ou encore Haunted House font le travail mais ne sauraient occulter le manque de relief d’un ensemble une nouvelle fois relativement fade et convenu (Who’s More Sorry Now? ou Pagan Man, au hasard). L’amoureux transi se retrouvera cependant sans trop de peine dans les passes d’armes électro-acoustiques de Get Simulated et Thunder And Lightning. Les lignes de basse limpides de Nomatterday ou The Lord Has Come Back Today le rassureront également quant au rôle joué désormais par Paz Lenchantin dans le groupe. Petites satisfactions sans importance comme autant d’arbres qui cachent la forêt. La fin de l’abondance a été annoncée il y a peu. Doggerel aura au moins le mérite de nous y préparer.
A ECOUTER EN PRIORITE
Nomatterday, Vault Of Heaven, Dregs Of The Wine, Haunted House, The Lord Has Come Back Today
No Comments