09 Sep 24 Party Dozen – ‘Crime In Australia’
Album / Temporary Residence / 06.09.2024
Noise expérimental
Les amateurs de douceur et de nuances passeront leur chemin. Le quatrième album de Party Dozen, Crime In Australia, nécessite une santé et un psychisme d’athlète, mais régalera sans conteste les fans déjà acquis et tous les amateurs d’énormes baffes sonores.
C’est toujours difficile de repousser les limites lorsqu’on joue en duo. Kirsty Tickle au saxo et Jonathan Boulet à la batterie se sont pourtant bien fait remarquer sur leur précédent album, The Real Work, mais l’apport vocal de Nick Cave était sûrement pour quelque chose dans cette soudaine notoriété. Qu’à cela ne tienne, le succès d’estime étant là, il ne fallait pas lâcher l’affaire. L’originalité des deux instruments assemblés et l’énergie que les deux musiciens mettent à explorer leurs limites – qu’on a pu suivre via deux EPs et feat très expérimentaux (Earthly Time et Fruits of Labour) – sont encore plus convaincantes tout au long de Crime In Australia.
On ne dira pourtant pas que l’album est plaisant. Ce serait leur faire injure. Leur domaine, c’est l’outrance, la distorsion, la saturation, le matraquage. En cela, ils ne déparent pas de la scène indé australienne. Si les précédentes productions laissaient avec évidence une place à l’improvisation, ce qui nous permettait de coller une vague étiquette free-jazz à leur son, l’ensemble est ici très produit, les déflagrations très réfléchies et savamment distribuées. Les premiers titres laissent entendre des références plus proches du blues, gras, lourd, un blues du bush testostéronné et colérique. Le son de Party Dozen menace comme une arme, nous saisit par le cou et nous secoue sans rémission. Coup de Gronk est une montée relativement tranquille vers l’anxiété, quelques loops apportant encore un peu de confort tandis que batterie et saxo se lâchent progressivement. Puis Wake In Might et ses faux airs de générique TV nous rassure quelques secondes avant que le pilonnage et la distorsion ne s’imposent sans retour possible. On attendra Les Crimes puis The Big Man Upstairs pour reprendre notre souffle. Le premier, titre le plus audible et mesuré confère presque à la pop dans ses atours pourtant industriels. Quant à The Big Man Upstairs, c’est un titre majeur, un des tous meilleurs singles de l’année probablement, le seul auquel soit adjoint un chant, lorgnant du côté de certaines envolées de Toy ou Brian Jonestown Massacre. Le sax y déploie un lyrisme inattendu, une profondeur et un envoûtement qui viennent souligner les paroles.
La fin du disque retourne vers une intransigeance sonore qui est la marque de fabrique du groupe. Dans ce déluge et cette furie, on soulignera le soin apporté aux ruptures et aux montées arpégées, presque hurlantes, de Bad News Department, ou à la puissance dévastatrice et coléreuse de Piss On Earth. Au final, dans ce Crime In Australia dont on sort rincé, tout aura été plus grand que nous. A l’image de Jon’s International Marketplace qui le referme, l’album n’est jamais à notre mesure. La musique de Party Dozen est un typhon qui nous submerge. Il est vain de tenter d’y résister.
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