Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp – ‘We’re Ok. But We’re Lost Anyway’

Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp – ‘We’re Ok. But We’re Lost Anyway’

Album / Bongo Joe / 02.07.2021
Manifeste surréaliste

L’Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp signe un cinquième album imparable pour enflammer l’été. Le collectif suisse à géométrie variable cultive en son nom, et depuis quinze ans, le goût de l’oxymore qui le rend si inclassable et jubilatoire. Du génial Marcel, il exploite plus la fibre absurde du dadaïste que le goût du ready-made, impression confirmée par le choix d’un ‘Orchestre Tout Puissant’, moins démiurge qu’héritier des formations africaines reines de l’impro et de la transe.

C’est dans la contradiction, la rencontre, et l’imprévu qu’il faut chercher l’or alchimique de ce combo toujours aussi inspiré, emmené par Vincent Bertholet. Se refusant miraculeusement à toutes les classifications (ethno-jazz, kraut, sérielle, world…), les motivations d’OTPMD sont à trouver dans l’instabilité, les affleurements du live, ou le rituel vaudou. Un mélange punk et cosmopolite enivrant, aussi efficace dans la rue que sur les scènes des festivals.

Ce nouvel album, We’re Ok. But We’re Lost Anyway, est donc sans surprise un album de contrastes. Sa musicalité toujours plus riche (12 musiciens à ce jour) s’éloigne des boucles sérielles systématiques entendues jusque là et des références afro-beat pour des rivages aussi fraternels, mais plus pop et caribéens. On est aussi interpellé par la présence plus marquée des voix, toutes les voix : chœurs polyphoniques, parlé-chanté, les musiciens semblent profiter tour à tour de quelques accords pour porter un message qui vibre en eux.

Le groove live irrépressible de la plupart des titres (Empty Skies, So Many Things (To Feel Guilty About), We Can, Can We, Beggining), emporté par une adéquation parfaite entre le swing des cuivres étincelants et les percussions complexes et effrénées, est borné par des passages plus méditatifs et graves : l’introductif Be Patient est un modèle de pop progressive, Blabber déroule sa tranquille mélancolie sur un roulement de marimbas, l’ironie triste et résignée de Flux s’appuie sur de lourdes basses et Silent clôt l’album sur une complainte rituelle polyphonique s’accordant magistralement à des cordes fiévreuses.

OTPMD ne publie pas qu’un manifeste artistique, festif et versatile, un calypso pour l’été. We’re OK. But We’Re Lost Anyway a choisi par la danse et la transe populaire d’ouvrir grands les yeux sur toutes les brûlures de notre époque. Il s’agit autant d’un manifeste politique, en cela qu’il en appelle à notre citoyenneté, notre solidarité, et qu’il sera difficile de ne pas se laisser entraîner à leur suite lorsqu’ils passeront par chez nous.

VIDEO
ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
So Many Things (To Feel Guilty About), We Can Can We, Beginning, Silent


1 Comment
  • Entecavir
    Posted at 10:23h, 06 août Répondre

    Surpris de ne pas croiser l’idée que cet opus est largement plus noir que ses prédécesseurs. On mesure ici le poids des hommes, l’inquiétude, qui, comme nous l’évoque le titre de l’album, nous invitent à méditer sur la détresse irréversible.
    Dark hippies.

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