06 Juin 16 Mourn – ‘Ha, Ha, He.’
Album / Captured Tracks / 03.06.2016
Rock- Post Punk
Soyons francs : lorsqu’on a entendu parler pour la première fois de Mourn en février 2015 à l’occasion de la session hiver de la Route du Rock, c’est surtout sa jeunesse qui nous avait interpelés. Mais qui pouvaient être ces quatre barcelonais de 17 ans de moyenne d’âge, avec déjà un album à leur actif sur l’overhype label Captured Tracks (Mac Demarco, The Soft Moon, DIIV) ? Persuadé d’avoir affaire à l’une de ces baudruches gonflées par le buzz, on prêtait une oreille distante à leur premier disque éponyme pour finalement revoir nos préjugés : en moins de trente minutes, le groupe envoyait des titres secs et nerveux d’une fausse simplicité, empoignés par les voix juvéniles mais habitées des guitaristes Carla Pérez Vas et Jazz Rodríguez Bueno. Oh bien sûr, tout n’était pas parfait, et parfois le groupe recyclait un peu à vide une recette punk sur fond de rancœur amoureuse. Mais l’ensemble s’avérait plus que convaincant.
Moins d’un an et demi plus tard débarque ‘Ha, Ha, He’, second effort de Mourn. Un disque publié tout de même avec plusieurs mois de retard, la faute à des démêlés administratifs et financiers avec le label espagnol Sones qui détenait une partie des droits du groupe. A l’arrivée, l’album s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur, empruntant autant aux Ramones pour son urgence à trois accords, qu’à PJ Harvey période ‘Dry’ pour sa rugosité et ses ambiances tendues. Les catalans n’inventent rien, c’est vrai, mais ce qu’ils réalisent avec un mélange de candeur et de rage brute se révèle captivant. Surtout, ils parviennent enfin à donner un véritable relief à leurs morceaux, à l’image du génialissime ‘Storyteller’ qui part d’une mélodie hachée et légèrement dissonante pour grimper en tension jusqu’à son final explosif où la rythmique martiale s’élève en même temps que les plaintes cathartiques de ses deux chanteuses.
Jusque dans ses limites techniques évidentes, Mourn propose un rock ambitieux. Certains s’amuseront encore de voir de si jeunes personnes revendiquer des influences qu’elles n’ont pas connues, du moins, dans le temps qui fit leur gloire. Mais ce serait déconsidérer totalement le talent de Carla, Jazz, Leia et Antonio à s’approprier ces références pour les mouler dans leur propre vision esthétique. Mourn avance avec sa foi et ses doutes pour les restituer dans des morceaux où les émotions sont aussi vives que réelles. Voilà qui devrait suffire au moins à dissiper les questions sur leur âge.
‘The Unexpected’, ‘Storyteller’, ‘Gertrudis, Get Through This !’, ‘Fry Me’
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