Monolithe Noir – ‘Rin’

Monolithe Noir – ‘Rin’

Album / Capitane / 26.08.2022
Krautrock

Toujours énigmatique et fascinant, Monolithe Noir se dresse à nouveau dans un paysage qu’on imagine beaucoup plus dégagé, aéré et minéral que précédemment. Si la description évoque à certains la Bretagne, le pari d’Antoine Pasqualini est gagné, lui qui revendique trouver l’inspiration dans cette région depuis quelques années. Un peu de tension, beaucoup de mouvement, Rin – c’est le titre de ce troisième album – est un voyage cinématographique parfaitement maîtrisé dans la matière sonore.

Yann Tiersen n’a pas le monopole de la Bretagne, il ne l’a jamais réclamé non plus, mais son travail est si marqué par son territoire de prédilection qu’il en est devenu naturellement une sorte de barde expérimental. Et force est de constater que les conséquences d’une immersion dans les terres de l’ouest sont les mêmes pour nombre de musiciens : un envoûtement, un éther, des textures épidermiques, un mouvement qui porte vers le large envahissent irrépressiblement les compositions.

Dans le travail de Monolithe Noir, ça se traduit tout d’abord par l’élargissement du groupe. De projet d’un seul, il devient œuvre à quatre mains, Yannick Dupont rejoignant Pasqualini tout au long de la création. Le son y gagne en espace et en mouvement : synthés et rythmiques tournent moins en boucle, les drônes sont plus discrets, les mélodies plus longues, les titres se succèdent dans une narration plus étalée. 

Rin semble composé de deux grands mouvements, comme un face A/face B à l’ancienne : le premier digne du psyché kraut de Beak ou Lumerians, explorant avec frénésie toutes les capacités de distorsion des synthétiseurs; le second lorgnant davantage vers le post-rock d’Oiseaux-Tempête ou Godspeed You ! Black Emperor pour la lente maturation tendue des titres, jusqu’à leur inévitable explosion.

On est bluffé par la qualité de l’ensemble, la musicalité et le grain qui traversent l’album. Dès les premiers tic-tac de Balafenn, on est emporté par l’étagement progressif des nappes qui s’installent. Cette façon de construire chaque composition ne se dément pas et concoure à un plaisir d’écoute chaque fois renouvelé. Le chant, qui traverse parcimonieusement l’ensemble apporte toujours profondeur (Brik, avec une façon de porter la voix qui rappelle le parler-chanté de Rodolphe Burger) ou densité (le très cold Finvus, le climax de Landmaerck).

Rin est un enchaînement de pépites où les titres plus ‘faibles’ (mais peut-on dire du discret Morse qu’il est faible, au regard de la subtilité et de la précision du son de l’harmonium ?) sont des transitions de luxe. La succession de deux morceaux magistraux comme Balafenn et Finvus en ouverture suffirait à bien des groupes comme marque d’excellence. Monolithe Noir réitère pourtant la magie avec Barra Rouge (ô la voix de Jahwar Basti ! ô le violon de Mirabelle Gillis !) et Landmaerck. Rin, qui signifie le secret, en breton, ne peut pas le rester plus longtemps. L’album, probablement abrasé par le vent et les vagues, est animé d’un bouillonnement convulsif, qui n’attend que la scène pour être encore magnifié.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Balafenn, Finvus, Brik, Morse, Barra Rouge, Landmaerck

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