
07 Mai 24 Moloch/Monolyth – ‘How Strange It Is…’
Album / A Tant Rêver du Roi / 26.04.2024
Indie rock
L’époque nous a rendus exigeants avec ce rock à qui l’on demande trop souvent énergie et/ou originalité, au point d’oublier trop vite que c’est l’application de ses basiques qui lui permet avant tout de traverser les générations. Une jolie mélodie, de belles harmonies, des refrains efficaces… Il n’en faut généralement pas beaucoup plus pour marquer les esprits et se retrouver sifflé sous la douche. Si ce n’est le talent, qui se charge à lui seul de faire la différence entre la simplicité forcée, et une autre – naturelle – donnant l’impression que certains musiciens sont capables de pondre des tubes comme ils respirent. Au sein du microcosme indie français, rares sont ceux que la nature a bien servi. Parmi eux, Moloch/Monolyth surnage.
Cinq ans après Naive Stories, premier album très réussi bien qu’il fut encore le témoignage d’un groupe en chantier, Michael Martin est de retour, désormais entouré de compagnons assez solides et dévoués pour que la route soit longue et belle : les fidèles Ita (batterie/chant) et Tony, rejoints ces derniers mois par Alexandre avec qui il forme, en parallèle, le duo électrique Equipe de Foot. C’est donc fort d’automatismes bel et bien acquis que Moloch/Monolyth a pu se lancer dans la composition de How Strange It Is To Miss You When You’re Right Here Next To Me : un titre qui met plus de temps à se lire que l’album à faire bonne impression tant, dès les premières notes du bien nommé Even Better Now, beauté et sensibilité jaillissent pour vérifier la formule de cette évidente simplicité tant recherchée.
Passée l’entame, Suns ouvre en grand les portes de l’intensité électrique tout en évitant le piège de marcher sur les plates bande du duo, puis emmène dans son sillon les enjoués I Can’t Be Yours, Spy et l’irrésistible There’s Nothing After qui, par leurs choeurs contribuant toujours pleinement à l’identité du groupe, se collent à nos oreilles pour ne plus les quitter. En trois coups, Moloch/Monolyth réveille une nouvelle fois les fantômes de The Bewitched Hands, sans conséquence puisque beaucoup ont malheureusement trop vite oublié le talent des rémois à sublimer eux-aussi la pop dans son plus simple appareil. Mais, tout comme son prédécesseur, ce deuxième album ne se contente pas seulement de briller lors de ses quelques sursauts. Dans ses moments les plus sensibles, quand il invite l’auditeur au plus près des instruments, le groupe marque les esprits avec la même force et la même conviction. En attestent les frissons provoqués par la délicatesse du titre éponyme qui s’en va arpenter les chemin de The Shins ou Broken Bells.
Puis, comme si la magie n’avait pas déjà assez opéré, les quatre portent le coup de grâce sur les quelques morceaux où ils ne savent pas choisir entre rock et folk, entre fougue et fragilité. D’abord sur Clothes, Shoes, Wigs, Make-Up, Nice Black Ties dont la place centrale n’est certainement pas anodine tant il se fait le parfait compromis entre force et finesse; sur l’imparable Pure Innocence où, entre deux arpèges acoustiques, le refrain se déploie jusqu’à vous coller littéralement à la cloison; puis sur le final I Will Leave You All At Once qui, s’il aborde le lourd sujet qu’est l’anxiété sur un air tout sauf anxiogène, se transforme en hymne fédérateur. ‘All the things we do for love‘ répète alors le groupe, solidaire, sur un air communial et plein d’espoir, comme entonné sous une pluie de bombes et de cocktails Molotov : une autre démonstration de la passionnante ambivalence de ce nouvel album qui, malgré quelques pensées sombres, panse pas mal de nos maux.
A ECOUTER EN PRIORITE
I Can’t Be Yours, Spy, How Strange It Is To Miss You When You’re Right Next To Me, Clothes, Shoes, Wigs Make-Up, Nick Black Ties, There’s Nothing After, Pure Innocence, I Will Leave You All At Once
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