Kiwi Jr – ‘Cooler Returns’

Kiwi Jr – ‘Cooler Returns’

Album / Sub Pop / 22.01.2021
Indie rock

Dans la famille ‘héritiers spirituels de Pavement‘, je demande le fils, à savoir Kiwi Jr., quartet de Toronto gentiment déjanté qui complète ainsi la main de Sub Pop dans la longue liste de ses acquisitions récentes et profitables du genre. Une carte à placer entre celles d’OMNI et de Rolling Blackouts Coastal Fever, c’est à dire entre post-punk décharné aux paroles sardoniques, et college rock nineties, avec son lot obligatoire de refrains à chanter sous la douche – pour se faire une petite idée, écouter les deux tubes incontournables que sont Undecided Voters et Waiting In Line.

Kiwi Jr. a donc changé de label, mais il n’a pas modifié grand-chose à sa formule par rapport à son premier essai sorti chez Mint Records. Les canadiens ont juste profité de Cooler Returns pour mettre un peu plus le Parquet C… euh pardon, le paquet sur les arrangements qui faisaient encore un peu défaut à Football Money. Interventions de guitares folk 12-cordes, touches de piano, d’orgue ou d’harmonica, batteries plus ou moins compressées selon les pistes… Au passage, la nouvelle palette de textures que Graham Walsh offre au groupe prouve que le vétéran de Holy Fuck et producteur historique de Metz peut exceller dans autre chose que le bourrin ou l’électro. On prend bonne note de cette info.

Autant le dire tout de suite, cela reste par contre compliqué de retranscrire en un paragraphe tout ce qui fait le sel des paroles du chanteur-guitariste Jeremy Gaudet. Difficile par exemple de résumer le sujet exact de Undecided Voters… Les élections américaines ? Le narcissisme encouragé par les réseaux sociaux ? Une chronique second degré raillant les étudiants des Beaux-Arts ? Tout cela à la fois ? Il semblerait que la bonne vieille méthode du cadavre exquis, si chère aux surréalistes, soit le premier moteur de l’écriture de Gaudet sur ce deuxième album .Et à l’écoute de ce puzzle thématique, certains fans de la première heure regretteront peut-être les satires plus directement accessibles du premier opus (le trader perdu de Salary Man, la société de consommation sur Gimme More…). Restent quand-même quelques passages relativement limpides qui parleront à tout le monde en ces temps de conspirationnite aigüe, comme cet extrait d’Omaha : ‘2021 tattooed on my ass / Man, what are you asking for, and why do you have to ask? / If we can’t even comfort our own, why ever go back home? / If the cover-up’s worse than the crime, let them find it on their own.’

Stephen Malkmus, sors de ce corps ! L’attitude nonchalante avec laquelle Gaudet interprète ce genre de commentaire oblique sur les petites et grandes névroses de nos sociétés rappelle bien évidemment celle de l’ancien leader de Pavement. Mais Malkmus est parfois capable d’autre chose que de nonchalance : selon les morceaux, il peut séduire comme un crooner, s’énerver un bon coup, ou même s’émouvoir sincèrement—des tonalités qui semblent encore échapper à la frêle voix du chanteur de Kiwi Jr. Serait-ce donc pour cela que les premières écoutes de Cooler Returns donnent l’impression d’un album qui ne fait véritablement mouche qu’un coup sur deux ?

La référence Pavement n’est peut-être qu’une fausse piste, de toute manière : il y a aussi dans la grammaire du groupe une petite science du riff et des chœurs qui renvoient aux Clash, ou encore un côté faussement bucolique qui pourrait faire penser aux meilleurs albums des Kinks. Les semaines qui viennent nous diront si ces nouvelles pistes nous rendront l’ensemble plus immédiatement saisissable à la longue, faisant passer Cooler Returns du statut de disque plaisant mais un peu secondaire à celui de véritable ‘slow grower’ qui marquera durablement les esprits. Là seulement, on pourra véritablement se dire que le ‘cool’ est bel et bien revenu.

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A ECOUTER EN PRIORITE
Undecided Voters, Cooler Returns, Nashville Wedding, Highlights of 100, Waiting In Line, Tyler


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