Kail – « True Hollywood Squares »

Kail – « True Hollywood Squares »

True Hollywood Squares[Album]
21/04/2008
(Big Dada/Pias)

Avec son enfance passée dans les rues de Compton et un début de notoriété du côté de South Central, Kail partait avec une indéniable longueur d’avance sur les nombreux prétendants au titre de gangsta rappeur, une spécialité locale popularisée par NWA et consorts à la fin des années 80. Pourtant, s’il a bien choisi de se tourner vers le rap, Kail préfére s’exercer des années durant aux côtés de son crew Customer Services, se frotter au public du célèbre Good Life Cafe et peaufiner un humour omniprésent dans ses textes.

Une attitude payante qui lui permet aujourd’hui de sortir son premier disque sur Big Dada, le vénérable label hip-hop britannique. Et si l’on peine à prendre au pied de la lettre un communiqué de presse qui parle de « classique instantané », ce « True Hollywood Squares » ne laisse pour autant pas grande place au doute quant au talent du jeune homme

Construit autour d’une visite guidée du ghetto, l’album concept fait la part belle aux personnages hauts en couleur, présentés dès l’introduction, qui nous décrivent tour à tour leur vision personnelle d’un environnement que l’on découvre éclectique. A l’humeur désabusée d’un tour guide (« The Realest Motherfuckin’ Tour Guide Ever ») répond l’énergie d’un choeur tout droit sorti d’une vieille comédie musicale (« Hawaiian Silky »), aux sonorités proches du grime (« The Glitterati ») succèdent le minimalisme d’un rap oldschool (« Peter Pennyworth ») ou d’une instru 8-bit (« Wendy ») et ainsi de suite. Jouant à fond la carte de l’entertainer, Kail se fond dans ses personnages avec une aisance qui en dit long sur ses capacités et son incontestable talent de conteur. Sauf que les limites de l’exercice sont ici atteintes et même repoussées. Avec une interlude de vingt secondes quasi systématique en début et fin de morceau, l’album fait davantage honneur aux slams introductifs des personnages qu’aux réelles qualités artistiques de leur démiurge. Ainsi coupé, de fait, dans sa continuité, l’album s’avère difficile à suivre sur la durée et l’on s’imagine mal retenter l’expérience sans un doigt placé sur la touche avance rapide

Si l’on était en droit d’attendre meilleure entrée en matière pour un rappeur de cette trempe, le résultat décevant ne doit pas faire perdre de vue les (nombreuses) qualités de l’album, notamment la maitrise technique de Kail et l’efficacité des productions. Originales et ambitieuses, elles contribuent la plupart du temps à capter de nouveau l’attention de l’auditeur perdu entre d’interminables skits. Si les comparaisons avec Nas, Gravediggaz, Jay-Z et Ice Cube paraissent encore déplacées pour l’heure, gageons qu’il ne s’agit que d’une question de temps.

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