
13 Oct 23 It It Anita – ‘Mouche’
Album / Vicious Circle – Luik / 13.10.2023
Noise rock
‘C’est pas qu’on n’en a rien à foutre, c’est qu’on y va à fond !‘. En une simple phrase, Michaël Goffard (guitare-chant) résume parfaitement le changement de cap qu’a opéré It It Anita suite au départ de son deuxième guitariste, Damien Aresta. Car oui, avec Mouche, le noise rock des Liégeois vient de prendre une tournure encore plus frontale et efficace que sur leurs précédents efforts : que ce soit au travers de choeurs rauques ou de tempo parfois enlevé (The World’s Last Cryptonaire, 9 Lives), ces neuf nouvelles compositions transpirent profondément les racines punk-hardcore du – désormais – trio.
Et plus que jamais, celui-ci semble avoir pris le parti de s’affranchir de (presque) toute limite en tentant avec brio, ici et là, quelques pirouettes et digressions stylistiques. En témoignent l’entame Crippling Guilt où Elliot Stassen (basse) ajoute une touche théâtrale au propos avec son chant en arrière-plan évoquant ce taquin de Buzz Osborne (Melvins), mais surtout Psychorigid dont la structure schizophrène bascule soudainement d’un marquage hip-hop à la Beastie Boys à un pilonnage punk en règle. Et même si les ballades façon Thurston Moore ou les échappées stoner manquent ici à l’appel, que les fidèles se rassurent : la bande continue d’évoluer au sein de son mélange de riffs à la fois tranchants et dissonants, de rythmiques détonnantes et de mélodies indie rock 90s renvoyant à Sebadoh et Pavement.
Les Belges partagent ici leur amertume quant au contexte sociétal toujours plus anxiogène et révoltant, qu’il s’agisse de l’état inquiétant de notre planète ou de ces crypto-millionaires dont la fortune ne repose au final que sur spéculations et exploitations de leurs semblables. Punk-hardcore on vous disait… Don’t Bend (My Friend) soulève même la problématique – d’autant plus fréquente à l’ère post-Covid – du niveau de préventes attendu par certaines salles de concert, y compris pour des formations comme It It Anita ayant pourtant déjà considérablement roulé leur bosse (plus de 300 dates en tout juste dix ans…). Reste que, même lorsqu’il relâche ses frustrations, le groupe trouve toujours le moyen de placer des formules ironiques (‘I’ve caused flash flooding and forest fires / Melted the poles with misguided remarks / I am to blame’, ou encore ‘Sitting in your red van, your back hurts / Do you really think it’s worth it boy ?/ Get some sleep, sunglasses on’) qui allègent un peu l’ensemble et rendent ainsi ses messages plus audibles. Ceux-ci sont d’ailleurs scandés de manière littéralement entêtante, le choix des mots et des phrasés ayant été particulièrement soignés.
Plutôt que de se laisser abattre par le départ de l’un de ses membres – qui plus est, originel – It It Anita a donc choisi la formule offensive en nous servant probablement là son disque le plus excitant. Et il y a fort à parier que sa pause de quelques mois sans concerts, comme les bons conseils de l’ingé son Amaury Sauvé ont joué un rôle dans l’affaire. D’ailleurs, une fois n’est pas coutume, Mouche n’est pas le nom de l’un des collaborateurs des Wallons, mais celui d’un golden retriever accueilli un temps par Elliot et devenu depuis chien d’assistance. Retenez bien cette bonne bouille qui illumine la pochette : il y a de grandes chances que vous la retrouviez en bonne position dans les top albums de cette année…
Photo : Titouan Massé
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