Ingrina – ‘Siste Lys’

Ingrina – ‘Siste Lys’

Album / A Tant Rêver du Roi / 27.11.2020
Post metal

Quand la société se fige, que les murs se dressent, trop hauts, trop longs, alors Ingrina apparaît à l’horizon, assombrit le ciel et gronde et souffle sa colère. Deux ans après son premier album Etter Lys, le sextet du Limousin revient avec Siste Lys : un disque de six morceaux n’hésitant pas à durer, dont certains, anciens et jamais publiés, ont été pour l’occasion retravaillés.

C’est donc par un orage homérique que débute les dix minutes de Jailers, les frappes lourdes réveillent les enfers, les guitares tournoient, aériennes vers le divin. Les accalmies ne sont que de courte durée, le temps d’une respiration profonde. Soudain la voix arrive, de loin, hurlée du fond des âges pour faire frissonner les corps.  Un tel morceau en ouverture vient confirmer la maîtrise absolue des tempos et atmosphères déjà affichés sur Etter Lys. Le suivant Walls erre dans le brouillard, mélancolique, alors que la batterie se fait tribale. On retrouve d’ailleurs ces éléments dans Stolidity où noirceur et lumière se croisent puis se percutent dans un grand et magnifique fracas final. Par opposition, mais fort logiquement vu son nom, Now marque par son immédiateté et sa violence condensée, comme un présent subi et trop intense. Une fois la déferlante passée, Frozen avance dans un univers désolé, minéral et met fin à l’épopée.

Ces six pièces massives, taillées avec grand soin, ont une histoire à raconter. Une histoire multi-millénaire, celle des contraintes que l’humanité s’est infligée à elle-même au fil du temps, des murs qu’elle a bâtis, des geôliers qu’elle s’est imposés, de ces corps qui ne bougent plus, grisés et figés dans une chape civilisationnelle. D’une épaisseur que même le puissant grondement d’Ingrina ne ferait trembler.

Pourtant, le groupe vient confirmer la grande réussite de son premier album en venant bouleverser les repères, balayer les certitudes, surtout celle de l’amateur de musique, en faisant voler en éclat les fragiles clôtures entre post-machin et post-truc. En associant à merveille puissance et envolées atmosphériques, Ingrina propose avec Siste Lys une œuvre d’une grande intensité, à la fois attirante et menaçante. Elle est comme une nature dantesque face à laquelle l’homme se sent petit et prend conscience de ses limites. Mais on aime le vertige, le sentiment de liberté grisant qu’elle procure, alors on s’y jette corps et âme. Même si ce n’est que le temps d’un disque.

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A ECOUTER EN PRIORITE
Jailers, Stolidity


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