05 Avr 12 Graham Coxon – « A+E »
Album
(Parlophone)
02/04/2012
Rock lo-fi
On se passera volontiers du couplet people sur l’état de santé de Blur, ses désamours, ses renaissances. Le duel de western à la mode Britpop avec Oasis dans les années 90 a aussi fait son temps. Conjuguons au présent. Si Damon Albarn barre adroitement sa carrière solo sur toutes les mers, et multiplie les projets divers, Graham Coxon, lui, concentre depuis huit albums toute son anxiété et sa créativité dans un rock lo-fi de toute urgence. Ses premières amours. Le ménage n’a pas été fait. Parasites et interférences sont toujours chez eux. Comme gage de rock garage, pour être sûr de son effet, l’Anglais se met des contraintes comme de composer à la basse – il doit se juger trop bon guitariste pour ne pas se laisser distraire – joue tous les instruments dans la même pièce, et enregistre sur sa vieille table de mixage. Tout ingénieur du son ou puriste en la matière doit d’ailleurs garder ce disque à distance raisonnable. Le natif de Hanovre en Allemagne est un activiste privilégiant l’efficacité et la vérité de l’instant, une philosophie qu’il tient autant à l’héritage punk et garage rock qu’à son amour du jazz. La vérité de Graham Coxon ne sait compter que de mélancolie à drame, et ce n’est pas les quelques traits d’humour qui vont panser les plaies. Coxon a capté le climat anxiogène de notre époque. La photo est prise et le sujet fait clairement la gueule. Produit par Ben Hillier (Depeche Mode, Clinic, The Horrors…), « A+E » pique avec fièvre et guitares (« Advice », « Running For Your Life »), repousse les limites de la saturation et de l’hypnose (« Knife In The Cast »), invite à la claustrophobie (« The Truth », « Bah Singer »), fait grincer les cuivres sur une basse terrifiante (« Seven Naked Valleys ») ou fait danser jusqu’au déséquilibre (« What’ll It Take »). Ce rock a les coudées franches de celui qui n’a plus rien à prouver.
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