Godspeed You! Black Emperor – ‘G_d’s Pee AT STATE’S END!’

Godspeed You! Black Emperor – ‘G_d’s Pee AT STATE’S END!’

Album / Constellation / 02.04.2021
Post rock

En ces temps de chaos généralisé, entre l’impasse d’un capitalisme outrancier que la pandémie a rendu plus palpable que jamais et une catastrophe climatique qui fait aujourd’hui office de fatalité, le retour de GY!BE semblait inéluctable. Les visions apocalyptiques et injonctions politiques des anarchistes montréalais paraissent indéniablement dans l’air du temps à l’heure où l’effondrement et le fameux ‘monde d’après’ sont désormais régulièrement au centre du débat public.

Septième album des vénérés hérauts de l’apocalypse, qui ont largement contribué à donner ses lettres de noblesse à un genre post-rock parfois décrié, G_d’s pee AT STATE’S END! ne dévie pas de la trajectoire imprimée depuis leurs premiers disques et de ce rock orchestral à l’ampleur démesurée. Enregistré au début de la deuxième vague avec l’aide de Jace Lasek (The Besnard Lakes), on y retrouve les collages sonores délaissés un temps par le groupe et qui viennent à nouveau peupler leurs fresques antimilitaristes de figures spectrales.

À l’instar de Allelujah! Don’t Bend! Ascend!, ce nouvel album se compose de deux longues épopées aux titres interminables et de deux plages plus calmes. Dans la lignée de leurs meilleurs œuvres, le morceau d’introduction construit une irrésistible tension dramatique en faisant surgir d’un brouillard de messages militaires et autres fritures radiophoniques un hymne de guitare dégoulinant de fuzz. S’ensuit une marche guerrière formant un climax hargneux et implacable pour se terminer, après d’énièmes rebondissements, sur un paysage faussement paisible que l’écho des explosions lointaines ne parviendra plus à troubler.

Le second plat de résistance vient former un parfait négatif du premier, en y déclinant le thème de guitare rencontré plus tôt sur un mode mineur avant de laisser place à une ballade lourde et mélancolique qui n’est pas sans rappeler un de leurs précédents ‘tubes’ (Moya). Après un court répit, succède un morceau lumineux et débordant d’un optimisme qu’on avait plus entendu chez eux depuis longtemps, une ascension infatigable se concluant avec fracas dans le tintement assourdissant de cloches célestes. Le dernier titre, OUR SIDE HAS TO WIN (for D.H.), est quant à lui sans doute la plus belle pièce d’ambient jamais composée par le groupe, avec des nappes de guitares saturées et de violons porteuses d’un espoir inextinguible.

Le pouvoir narratif du collectif montréalais reste donc intact et inégalé malgré le poids des années. S’il n’est peut-être pas aussi inoubliable que leurs premiers albums, AT STATE’S END vient compléter de manière magistrale une œuvre qui a rarement semblé aussi vitale et pertinente qu’aujourd’hui.

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