Glauque – ‘Les Gens Passent, Le Temps Reste’

Glauque – ‘Les Gens Passent, Le Temps Reste’

Album / 15.09.2023
Hip hop electronica

Pas de publicité mensongère chez Glauque ! Si vous comptiez retrouver un peu d’espoir, remettre un peu de couleur dans votre quotidien, l’écoute de Les Gens Passent, Le Temps Reste va vous faire l’effet d’un passage en caisse à la station Total. Car, sans cesse bringuebalés entre malaise et rage de vivre, les Belges portent bien leur nom. Trois ans après un premier Ep, le groupe a peaufiné son identité, laissé passer l’orage pandémique qui a certainement décoloré sur ces douze titres sombres jusqu’à l’opaque, pour enfin attendre son heure, de gloire, qu’on lui promet depuis ses premiers balbutiements. ‘Glauque sera grand‘ se disait-on à l’écoute de Robot ou Plane, premiers aperçus du talent de ce collectif de Namur. Cinq ans plus tard, le noir névrosé se colorie au présent. 

Porté par une évolution exponentielle, le quatuor n’a lésiné sur rien pour rendre un premier album affuté comme une lame, dans ses productions hip hop baignées d’electronica comme dans les textes d’un Louis Lémage désormais assez mature pour aller jusqu’à se mettre à nu et prendre les risques les plus casse-gueules. Tissé pour traverser les étapes du deuil, ‘de l’incompréhension au doute, en passant par la colère et la tristesse, jusqu’à l’acceptation‘, ce premier album ne semble avoir suivi qu’un seul leitmotiv : placer l’émotion derrière le pupitre du chef d’orchestre et s’assurer que rien, de la production aux arrangements en passant par le mix, ne vienne la parasiter. ‘J’ai pas d’envie particulière à part toucher les gens‘ rappelle l’orateur en fin de course.

La vie de Glauque n’est que combats, et pas question que Les Gens Passent, Le Temps Reste s’achève sans que le message soit passé. Le doute face à soi-même (Plusieurs Moi, Ego, On Oublie et On Recommence), la normalisation imposée par notre société (Plan Large), le deuil au sens propre comme au sens figuré pour mieux repartir de l’avant ou guérir (Pas Le Choix, Bleu.e, Plan Serré, Friable), ou un peu tout cela à la fois (Noir, Rance, Deuil) sont autant de thèmes qui nourrissent l’idée générale de l’album et qui, exprimés de la sorte, incarnent l’identité de Glauque dans cette cours d’artistes à la fois urbain et chanson, ou se côtoient le bon et le moins bon.

Car si les belges rappellent ici ou là le gratin des cascadeurs de la musique, du hip hop oppressant et finement écrit de Luther à l’ouverture d’esprit et le manque de considération pour les étiquettes cher à Odezenne, ils s’imposent le temps de ces douze titres telle une entité à part, une fusion de talents à la fois lyriques et musicaux qui explosent les chapelles. Parce que si le rap fait incontestablement office de socle à l’oeuvre de Glauque, que le groupe livre même des titres à l’efficacité jalousée (Ego, Friable), il ne refuse rien – même pas l’expérimentation (Plan Serré) – pour le bien de son propos.

Production électronique façon Moderat pour soutenir le débit de parole de Plan Large ou Bleu.e, ou pour accompagner les refrains chantés et accrocheurs de Pas Le Choix ou Noir, une boucle de piano bordée d’arrangements minimalistes pour que l’émotion se chante (On Oublie et On Recommence), un Rance magnifico-dramatique que ne refuserait pas le meilleur d’Orelsan, puis cette façon de refermer la parenthèse entre improvisation et monologue obsessionnel récapitulatif… Rien dans la réussite de Glauque ni dans cet exigeant premier album ne s’en remet au hasard. La genèse de Les Gens Passent, Le Temps Reste fut longue, mais valait l’attente bien plus qu’on osait l’espérer. ‘Le deuil est fait‘, alors vivement le prochain désenchantement si le monde veut bien attendre avant de définitivement tomber en ruines.

VIDEO
ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Plan Large, Pas Le Choix, Noir, Friable, On Oublie et On Recommence, Rance


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