22 Oct 19 Girl Band – ‘The Talkies’
Album / Rough Trade / 27.09.2019
Rock noise psychotique
Jusqu’à quel point l’état mental d’un individu déteint sur ceux qu’il fréquente, au point de contaminer par convulsions successives membres et instruments, tenus alors de recracher dans un même geste les troubles et les secousses qui viendraient traduire la fine barrière existant entre folie creuse et psychotisme véritable ?
A l’écoute de The Talkies, le nouvel album de Girl Band, ce (trop) long questionnement s’imprime en filigrane, telle une problématique que le groupe se devait de résoudre à travers l’écriture et l’enregistrement de ce chapitre laborieux, longtemps retardé par les problèmes mentaux de son chanteur, Dara Kiely. Dès la courte ouverture Prolix, le ton est donné à mesure que se fait entendre sa respiration plus ou moins haletante, témoignage glaçant d’une de ses crises de panique en studio.
Dès lors, dans une atmosphère tendue de bout en bout, s’amorce la teinte d’un album centré sur une brèche béante que les quatre irlandais semblent contempler tout du long, les deux pieds dans le vide. Autour du précipice s’organise alors un rock aussi bien nourri à la noise qu’à la techno, et qui se débarrasse au plus vite de tout formalisme, de toute structure rock ‘classique’, privilégiant une vitalité abrasive constamment maintenue sur des morceaux à la durée aléatoire, liés entre eux par des humeurs changeantes et imprévisibles.
Au sein de ce défilé schizophrénique, difficile de se raccrocher à un titre en particulier, tant les formes attendues semblent se dissoudre à mesure qu’on essaye de les accrocher. Aussi à l’aise dans la pastille éructée (Aibophobia, Amygdela, Caveat) que dans son tissage méthodique et anarchique des textures (la conclusion de Shoulderblades qui prend des teintes ambiantes, la deuxième partie de Prefab Castle qui se transforme en after de Daniel Avery), Girl Band délivre un album à la densité et à la richesse fascinante, incitant chaque morceau à être redécouvert au gré des expérimentations studio que le groupe a insufflé tout au long de son projet le plus fou et le plus libre. Loin d’un classicisme rock écorné, le quatuor nous rappelle le pouvoir d’expérimentation et d’audace d’une guitare, d’une batterie, et d’une basse dès lors qu’elles se retrouvent entre des mains et des têtes tournées vers un ailleurs aspirant à sonner résolument autre.
A ECOUTER EN PRIORITE
Going Norway, Shoulderblades, Aibophobia, Salmon Of Knowledge, Caveat, Laggard, Prefab Castle
No Comments