Fire! Orchestra – ‘Echoes’

Fire! Orchestra – ‘Echoes’

Album / Rune Grammofon / 14.04.2023
Jazz

Depuis plus de 10 ans, Fire! Orchestra nous livre des oeuvres frisant l’excellence. Qui plus est, l’opulent collectif mariant jazz, soul, rock et funk parvient à chaque sortie à surprendre. Les deux heures d’Echoes ne dérogent pas à la règle, même si ce nouvel album incarne une forme de retour en arrière orchestrée par un collectif atteignant… 43 musiciens.

Cette nouvelle mue est parfaitement incarnée par I see your eye, part 1 dont les premières notes ont vraisemblablement produit quelques frissons parmi les habitués du groupe suédois. Si Echoes est plus instrumental, il reste guidé par une rythmique implacable mélangeant contrebasse, batterie et percussions (A lost farewell), soutenue par les envolées de sax ou de piano (Lost eyes in dying hand). La puissance de Fire! Orchestra repose toujours sur ses rythmes hypnotiques et groovy débouchant immanquablement sur un déluge de sons organiques. Mais malgré un nombre inhabituel de musiciens, le collectif évite l’écueil de la surcharge sonore en mariant moments de symbiose sonore complète et passages presque silencieux.

La structure de l’album est singulière. Principalement composé par Mats Gustafsson, Johan Berthling et Andreas Werliin, Echoes alterne longues plages et calmes interludes s’apparentant parfois à des murmures. En découle un véritable voyage, remarquablement agencé par Jim O’Rourke. Les deux heures de musique n’en sont pas moins exigeantes et risquent de décontenancer les novices. Pour les plus pressés, les rythmes effrénés de Forest without shadows subtilement teintés d’accents arabisants sont un des moments forts du voyage musical. Un autre point d’orgue est Lost eyes in dying hand où la voix éreintée de Joe McPhee émerge après 10 minutes épousant le rythme et les notes de piano. Progressivement, le morceau s’envole pour se terminer sur une irrésistible et soudaine envolée free jazz évoquant Ascension de Coltrane. Comme sur leur premier long-format Enter, l’entêtant motif de départ est repris pour clore ce voyage musical aux côtés de Joe Mcphee (sax tenor) et des ondulations caractéristiques de Mats Gustafsson.

Si Echoes se révèle plus instrumental et différent dans sa structure que ses prédécesseurs, il n’en demeure pas moins varié. L’irruption d’une voix masculine sur Lost eyes in dying hand se distingue aussi des albums antérieurs principalement guidés par les voix féminines de Mariam Wallentin et Sofia Jernberg. Tout au long du disque, des passages plus avenants suivent les morceaux exigeants, permettant de reprendre pied. Comme sur le sublime A lost farewell où la rythmique déchainée est seulement interrompue par le souffle rugueux de Mats Gustafsson, rappelant au passage qu’il appartient aux meilleurs saxophonistes de sa génération. Le morceau s’emballe à mi-parcours débouchant sur un déluge orgiaque. Ou comme les 15 minutes de To gather it all. Once conduites par la voix grave de Mariam Wallentin, qui proposent un moment de rêverie. L’album explore enfin de nouvelles sonorités lorgnant fréquemment du côté arabisant ou plus rarement latino-américain (Cala Boca Menino).

Plus d’une décennie après une première oeuvre exigeant, Fire! Orchestra nous livre un nouvel opus exceptionnel, bien que plus complexe. Le collectif donne l’impression de revenir en arrière tout en ayant intégré la magie déployée au cours de sa première décennie. Conviant une fusion éclectique de genres faite de lentes montées prog-rock, d’envolées sauvages, passages free-jazz et de sublimes voix, Echoes rappelle à quel point la musique peut être orgasmique. À l’instar du Requiem for Jazz d’Angel Bat Dawid sorti il y a quelques semaines, Echoes risque certes de faire fuir les plus pressés, mais révéler tout sa puissance au fil d’écoutes attentives. On ne peut, encore une fois, que crier au génie.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Echoes :Forest without shadows, ECHOES:Lost eyes in dying hand


1 Comment
  • EricTR
    Posted at 16:58h, 26 mai Répondre

    A propos de Fire Orchestra : assez d’accord avec la chronique, c’est un disque intéressant

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