Femi Kuti – « Day By Day »

Femi Kuti – « Day By Day »

Day By Day[Album]
27/10/2008
(Fko Music/Pias)

A sa mort en 1997, Fela savait qu’il pouvait compter sur sa progéniture pour assurer la survie de l’afrobeat, auquel il consacra la plus grande partie de sa vie. Alors que les Egypt 80 étaient confiés au jeune prodige Seun, Femi avait déjà amorcé une carrière au Nigeria, s’investissant à la fois dans le domaine musical, social et politique de son pays. Néanmoins, l’aîné de la famille Kuti a toujours manifesté une volonté d’émancipation par rapport au genre originel créé par son père, comme en témoigne sa volonté de mixer l’afrobeat avec des genres nés de l’autre côté de l’Atlantique, comme la soul, le hip-hop et le jazz. Rappelons à ce titre que le premier album de Femi, déjà emblématique d’un style nouveau, fut signé sur Motown en 1995

Au-delà de cette prise de liberté musicale, Femi n’en reste pas moins un des plus grands activistes nigérians du moment, poursuivant le combat paternel au sein du fameux « Shrine », sa salle de concert installée à Lagos, faisant aussi office de maison d’accueil, de lieu de débat et de contestation, très mal perçu par les autorités qui n’hésitent pas à y employer aveuglement la force… Mais quoiqu’il arrive, la musique reste toujours reine au « Shrine », et continue à transmettre ses messages engagés de lutte contre la misère, l’injustice, la corruption et la violence, parfaitement restitués dans les albums de Femi, de « Fight To Win » sorti en 2001 à ce dernier « Day By Day » qui ne déroge pas à la règle

Représentatif du style Femi, ce nouvel opus s’affiche comme une galette résolument métissée, et nourrie d’une puissante énergie, conduisant progressivement son auditeur vers une transe entêtante. Car les racines de l’afrobeat sont bel et bien là: des nappes de cuivres infatigables (« You Better Ask Yourself », « Tension Grip Africa »), des rythmiques frénétiques qui agitent le corps (« Demo Crazy »), des thèmes tirés tout droit du répertoire de Fela (« One Two », « They Will Run »), et bien sûr un engagement politique à toute épreuve (comme dans « Tell Me », qui dénonce l’indifférence arrogante et cruelle des politiciens)

Mais Femi Kuti garde cet art d’incorporer à ces bases fondamentales sa touche personnelle. D’abord au travers de sa voix singulière un brin nasillarde, qu’il n’hésite pas à faire pencher du côté de la soul, comme dans les excellents « Oyimbo » et « Eh Oh », rappelant ça et là Curtis Mayfield ou Mos Def. Ensuite au travers d’expérimentations musicales nouvelles, comme dans le voluptueux « Day By Day », auquel les choeurs menés par les chanteuses Julia Starr et Camille donnent un caractère mystico-religieux, ou le stimulant « Dem Funny », titre quasi slamé où Femi est accompagné par la guitare de Keziah Jones. Nous retiendrons enfin les vibrations jazzy de « Do You Know », dans lequel un bel hommage est rendu à Fela, mais aussi aux godfathers du jazz, comme Miles Davis, John Coltrane, Dizzy Gillespie et Billie Holiday

Finalement, si ce dernier « Day By Day » ne remportera certainement pas tous les suffrages, risquant parfois d’effrayer ou d’égarer les puristes, son audace et sa fraîcheur ont le mérite de rendre plus accessible un genre trop souvent perçu comme hermétique par les oreilles profanes. Malgré quelques rares imperfections dans son afrobeat, Femi Kuti poursuit un travail très louable de démocratisation du genre, qui, s’il passe inévitablement par une légère ouverture sur des sonorités plus mainstream, empruntant notamment à la soul et à la pop, a toutes les chances de porter ses fruits à l’avenir

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