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05 Avr 20 FACS – ‘Void Moments’
Album / Trouble In Mind / 03.04.2020
Post rock industriel
Faire le vide. Faire avec le vide, le manque. Rarement ces jours-ci ces deux maximes auront parlé à autant de personnes sur cette planète. Manque de repères, manque de chaleur humaine, manque d’espace… Vu ce contexte, on redoutait un peu d’affronter la troisième production discographique de FACS, dont le post-rock répétitif, expérimental et anxiogène, noyé dans des volutes que l’on qualifiera faute de mieux d’’industrielles’, semblait tout indiqué pour nous faire plonger dans la dépression la plus profonde, damnés du confinement que nous sommes déjà. Et on ne pourra même pas faire mieux que de parler en termes froids de ‘production discographique’ pour désigner Void Moments : une fois de plus avec le trio de Chicago, il est difficile de dire si l’on a affaire à un EP ou un LP ici, autre preuve que la formation créée par deux ex-Disappears n’a pour but que d’aller au bout de sa ligne de fuite en s’affranchissant de tous codes pouvant les rapprocher de quelque chose de connu.
Force est de constater que ce pari est une fois de plus emporté haut la main. Pourtant, lorsque les premières notes de Boy retentissent, on se surprend à trouver l’entame pas si hermétique ou déconcertante que cela. Non pas que l’ambiance se prête à la franche rigolade, loin de là… Mais entre le hook hypnotique de guitare, les lourds coussins de plomb des basses, et surtout ce double pattern de batteries en contretemps qui se déploie en mode panoramique d’une oreille à l’autre, tout dans ce premier morceau semble nous encourager à dodeliner de la tête en dépit du bon sens, comme si FACS s’était décidé à infuser un peu de couleurs dans sa palette pourtant généralement charbonneuse. Les deux morceaux suivants, Teenage Hive et Casual Indifference, semblent suivre la même ligne, relançant en permanence le propos, et portés par une batterie plus dynamique et précise que jamais, au son massif, alternant syncopes vicieuses et breakbeats destructurés en mode downtempo (la section rythmique est incroyable tout au long du disque). L’attente et la stase ne sont plus les maîtres mots. Une certaine énergie les remplace, sans rien diluer de l’exigence expérimentale de départ.
Là on se dit que les trente minutes du disque vont passer plus vite que prévu. Il semblerait toutefois que FACS ait ce coup-ci pris un malin plaisir à laisser ses cartouches les plus accessibles sur la première face, certainement pour que le malaise ne soit que plus prégnant par la suite. Les boucles d’effets s’enchainent ainsi et finissent par se confondre, scies circulaires vrillant les neurones, rotatives éternelles, abaisse-langues laissant comme un goût d’acier et de rouille dans les bouches pâteuses (Version, Lifelike, Dub Over). Certains supporteront mal d’avoir baissé leur garde au début. Une léthargie adipeuse s’emparera de vous et ne vous relâchera plus, suscitant le dégoût, à moins que vous ne vous laissiez volontairement sombrer dans l’entropie, espérant trouver au fond de ce bad trip quelque chose qui vous permettrait d’exorciser vos vieux démons. Void Moments n’est pas un album, c’est une chausse-trappe, une plante carnivore qui diffuse un parfum enivrant pour mieux pouvoir vous digérer ensuite. Enfer moderne. Into the void indeed.
A ECOUTER EN PRIORITE
Boy, Teenage Hive, Casual Indifference
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