Erika Angell – ‘The Obsession With Her Voice’

Album / Constellation / 08.03.2024
Art pop / Expérimental

Angell. Deux ‘L’, deux ailes, deux ‘elle’. Suédoise d’origine, active depuis plus d’une décennie sur la scène Montréalaise où elle multiplie les collaborations, il y a décidément plus qu’une simple dualité dans la musique d’Erika Angell. Sa voix longtemps cachée en arrière-plan des enregistrements de Timber Timbre, Patrick Watson ou même Leonard Cohen, la chanteuse de Thus Owl livre enfin son premier album solo dans l’écurie Constellation.

Une percée vers les étoiles qui débute par le décollage d’un vaisseau spatial à l’image, justement, du Spaceship qui clôturait l’opéra Einstein On The Beach de Philip Glass. Cette ‘robe de tranquillité’ revêtue dès le morceau d’ouverture, pourtant si mouvante et agitée, pénètre alors l’espace comme nos esprits, tels les mélodies et chants synthétique de la Space Lady qui hantait les trottoirs de Boston avec sa musique venue d’une autre galaxie. Un champ des possibles et un chant des machines où s’immiscent la mélancolie, l’émotion et la contemplation à travers des titres kaléidoscopiques : spokenword sur fond de percussions anxiogènes dans German Singer, One et Good and Bad, glitchs fantomatiques et polyphonie numérique façon Holly Herndon sur Open Eyes et Bear, magie incantatoire et introspective pour Up My Sleeve et Let Your Hair Down. L’héritage musical de Laurie Anderson et des grandes dames de l’avant-garde irrigue alors toute sa musique. Reposant sur une montée diatonique de trois accords majeurs avant une modulation faisant basculer le dernier accord vers le mineur, Never Tried To Run est un bijou d’efficacité, à la fois pop dans l’esprit mais toujours exigeant dans sa production, porteur d’un minimalisme tout relatif et surtout d’une précision formelle et émotionnelle imparable.

Temple referme cette petite odyssée en recentrant son spectre sur les timbres du violoncelle et de la voix, bouclant la boucle ouverte avec Dress Of Stillness et nous laissant alors face à l’évidence : nous serons nous aussi désormais obsédés par cette voix et cet univers si singulier, visiblement décidés à nous emmener droit vers le firmament.