25 Mai 18 E – ‘Negative Work’
Album / Thrill Jockey / 25.05.2018
Indie rock
Avec à son bord trois figures de la scène rock de Boston, E a quasi l’allure d’un all star band. Jason Sidney Sanford (Neptune), Thalia Zedek (Come, Uzi, Live Skull) et Gavin McCarthy (Karaté), tous connus pour des faits musicaux majeurs, ne sont cependant pas du genre à raviver la flamme nostalgique de leurs prouesses passées, mais plutôt à constamment questionner leurs approches de la musique angulaire. Avec Negative Work et un regard toujours aussi pétillant pour le rock instinctif et frontal, ils s’affichent en toute décontraction pour déjouer les aprioris.
Durant son processus de création, le trio a préféré miser sur l’épure plutôt que sur le remplissage, laissant l’effet hypnotique des répétitions opérer naturellement, et l’expression libre des chants – tour à tour partagés – s’imposer dans les interstices. Chacun trouve alors sa place dans un respect mutuel et un amalgame de propositions alléchantes, interprétées avec classe : Gavin McCarthy, que l’on connaissait surtout avec Karaté pour sa justesse de jeu posée au fond du temps, libère ici son excellence dans un engagement total ne laissant aucune place à l’approximation (Poison Letter, A House Inside, Untie Me); Jason Sidney Sanford, derrière ses guitares bizarroïdes singulièrement accordées et fabriquées par ses propres soins, provoque des tonalités inattendues (Cannibal Chatroom, Hollow) que Thalia Zedek enveloppe à son tour de sa guitare tantôt limpide ou fracassante (Pennies, The Projectionist, Down She Goes).
De cette triangulation d’identités fortes où l’ego n’a définitivement pas sa place, chaque titre prend alors forme dans une abstraction réfléchie, travaillée en commun dans un dialogue permanent. Et pour rester fidèle à sa spontanéité scénique, le groupe a enregistré l’album en quatre jours au studio Machines With Magnets (Battles, Lightning Bolt), s’évitant ainsi judicieusement de glisser dans des arrangements savonneux. Au final, les américains nous offrent ainsi un disque intense, s’inscrivant dans une veine rappelant fortement l’esprit urgent et chaotique des 90’s. Proche de Sonic Youth, de The Ex, ou d’un Hoover dépouillé, Negative Work est convaincant dans sa largeur, et prouve que l’indie rock reste intemporel quand il est joué sans chichis, le nombril au vestiaire.
A ECOUTER EN PRIORITE
Pennies, The Projectionist, A House Inside, Down She Goes, Untie Me
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