
14 Nov 21 Dinosaur Jr – ‘Emptiness At The Sinclair’
Album / 29.10.2021
Rock
Avoir été privé de concerts pendant près d’un an et demi – en dehors de ce que cela impliquait socialement, culturellement, voire intellectuellement – a créé un autre type de manque chez les mélomanes : celui des décibels. Il y a un aspect cathartique dans le fait d’écouter un concert à blinde. On sait que Dinosaur Jr aime cette sensation, et la manière dont J. Mascis place sa colonne d’amplis derrière lui, à la manière d’une carapace de distorsion, en atteste parfaitement.
Difficile d’imaginer ce que le manque de volume sonore a pu provoquer chez un groupe comme le sien. Peut-on développer une addiction au bruit ? Sans doute si l’on en croit la force sonique de ce Emptiness at the Sinclair, enregistré sans public mais sur scène dans des conditions live, avec éclairages et retours. L’absence d’audience ne dessert d’ailleurs aucunement l’enregistrement qui y gagne en clarté, et l’énergie de ce live est plus grande encore que sur le dernier album studio du trio.
Dinosaur Jr en est à sa trente sixième-année d’activité, et ce live retrace cette hallucinante carrière le long de seize pistes extraites de neuf des douze albums de sa discographie puisque seuls Hand It Over, I Bet On Sky, et Give a Glimpse Of What Yer Not sont aux abonnés absents. Fait amusant : les deux disques les plus cités ici sont (logiquement) le plus récent, l’excellent Sweep It Into Space, mais également le premier, éponyme. L’enregistrement fait ainsi office de passerelle entre les deux extrémités chronologiques de ce trio aux relations houleuses. L’ouverture se fait d’ailleurs avec Bulbs Of Passion, composé il y a bientôt quatre décennies et qui, outre l’inévitable coup de vieux qu’il peut asséner, permet de remettre à jour l’incroyable précocité de ses géniteurs, esthétiquement parlant.
Les entendre parfaitement produits, délestés de leur sceau lo-fi initial, offre d’en apprécier différemment les qualités mélodiques et soniques. Ainsi, Forget The Swan, qui semblait déjà annoncer les débuts de Sebadoh ou Sentridoh avec Weed Forestin’ et The Freed Man, semble bizarrement perdre de sa force en étant mieux enregistré, contrairement au titre du même album chanté par Mascis. Comme si le lo-fi était finalement une marque de fabrique qui convenait mieux à Lou Barlow qu’à son acolyte.
Mais ce que l’on retient de l’ensemble de cet album, outre le fait qu’il puisse servir de porte d’entrée à la discographie du groupe originaire du Massachusetts, c’est la joie, l’énergie pure, le souffle de soulagement et l’espoir d’un retour à la vie normale. Un retour qui s’opère par le gros son, par les gros riffs (le flanger en disto de Freak Scene est un vrai shoot d’adrenaline à lui seul) émanant d’un groupe dont les qualités en live sont au moins aussi riches que celles en studio. A cet égard la réinterprétation de Garden est plus belle encore que sur Sweep It Into Space. C’est nourri de cette énergie incroyablement communicative que l’on sort de l’écoute de ce live qui, avec un plaisir indéniable, vient foutre un violent coup de pied au cul des derniers dix huit mois.
A ECOUTER EN PRIORITE
Bulbs Of Passion, Garden, Get Me, Feel The Pain, Freak Scene
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