
15 Jan 25 Denude – ‘A Murmuration of Capitalist Bees’
Album / Dipteride – Export Work / 10.01.2025
Rock noise
Des écrans de l’ère cathodique, à jamais éteints, témoins d’une époque révolue, empilés en totem dans un lieu à l’abandon. Accumulation de vestiges d’une civilisation qui élevait l’image et l’information aux rangs de divinités ou simple construction plastique ? Quoi que cette œuvre nous dise, en la choisissant comme visuel accrocheur pour sa pochette d’album et en l’affublant d’un titre éloquent, A Murmuration Of Capitalist Bees, Denude donne d’entrée matière à réfléchir sur le monde contemporain.
Originaires de Chicago et de Milwaukee, James David, Jesse Schomisch et Matt Parrish ont déjà fait du chemin auprès de Piglet, Murder Of The Red Barm, Fuiguinet et Credentials avant de se retrouver à composer ensemble. Une solide expérience qui entre en résonance avec le fond d’un propos questionnant nos sociétés capitalistes, et la forme des huit titres sous haute tension de ce premier long format aux sonorités brutes et typiques du post punk du Midwest.
Le trio s’y expose dans un éventail habile où post rock, noise et math rock digeste allient leurs forces autour de la voix scandée de l’électron libre James David, qui provoque d’entrée un écho touchant avec celle du regretté Steve Albini (Oh Friend Entropy, Animal Tracks). Préférant s’exprimer globalement dans la clarté sonore de sa section guitare-basse plutôt que dans des élans saturés – néanmoins présents sur les plus enragés Ypre, Single March Marching Orders et Phalanx rappelant un Pile énervé -, le groupe enflamme son esthétique faussement minimaliste au travers d’inspirations aux structures rythmiques complexes, toujours augmentées de trouvailles mélodiques bien inspirées (12th Battle On The Isonzo, A Flying V), et ce jusqu’à toucher le graal sur l’entêtant All Fours, final à la guitare aussi limpide que lapidaire.
Si l’impression de déjà entendu rôde ici ou là, que l’on pense furtivement par endroits à Shellac, Faraquet et pourquoi pas à Self Evident ou The Conformists dans certaines tournures, ces trois-là ne camouflent pas leurs origines musicales dans des tentatives hasardeuses et jouent pleinement la carte de l’honnêteté, en dignes héritiers d’un esprit nineties encore capable de réjouir et de suprendre. Au final, A Murmuration Of Capitalist Bees ne souffre d’aucun coup de mou. Il défile dans la maitrise et l’inventivité permanente de ses protagonistes, cohérents dans chacune de leurs intentions, esquivant au passage les petits défauts ou surenchères qu’offrent parfois l’acte fragile du premier album. Incontestablement, Denude marque d’entrée de jeu les esprits et semble avoir trouvé la bonne formule pour décrire la faillite intellectuelle de l’humanité.
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