Damien Jurado – ‘The Monster Who Hated Pennsylvania’

Damien Jurado – ‘The Monster Who Hated Pennsylvania’

Album / Field Painting / 14.05.2021
Folk

Plus les années passent, plus on s’interroge sur les raisons du manque de notoriété de Damien Jurado, plus elles soulignent la constance édifiante de son talent. Pas une année sans que le canadien ne livre un album aussi bon voire meilleur que le précédent, mais il semble pourtant que son cercle de fans ait atteint, inexplicablement, une sorte de plafond de verre.

The Monster Who Hated Pennsylvania est le titre de son excellente livraison annuelle, et on le parcourt comme les précédents, comme si on lisait les notes prises par ce musicien contemplatif, derrière la fenêtre d’un café. Damien Jurado reste cet émouvant diariste qui croque ses contemporains dans toute la beauté de leur vie simple, et enveloppe ses mots de mélodies aussi dépouillées que touchantes. Des noms, des petits combats ordinaires, des victoires infimes parfois résumées en à peine plus d’une minute, voilà le monde du canadien.  Cette fois, ce sont Helena, Tom, Joan, Jennifer qui l’ont inspiré, et ces tout petits invisibles, dans les mots de l’album, cherchent courageusement la lumière, contemplent la lune, apprennent la patience, restent convaincus que la chance comme l’amour les attendent quelque part.

Damien Jurado creuse toujours son sillon folk bâti autour de sa voix d’ours, chaude et profonde, et de quelques accords de guitare qui font mouche sur tous les titres (Minnesota et Hiding Ghosts, deux leçons de dépouillement et de musicalité). Ses mélodies ne trébuchent jamais, et ses choix d’ornementations sont toujours judicieux, à l’image de la percussion ronflante de Tom et Dawn Pretend, ou des petites perles de cristal sur ce même titre, le vibrato de Jennifer, ou sa propre voix en écho, presque psychédélique, accompagnant sa voix dans les aigus de Male Customer #1.

Pour réveiller l’équilibre parfois lénifiant (il faut l’admettre) de l’album, Jurado plante une montée grandiose de plus de cinq minutes, Johnny Caravella, en son centre. Pleine de bravoure, sans refrain, aussi irrésistible qu’inattendue, cette partition est faite d’une colère progressivement lâchée aux accents aussi  blues que psychédéliques. Une merveille qui éclate comme un orage et laisse derrière elle un fracas de cordes inconsolables. Ce titre  pourrait seul justifier l’importance de cet album et de l’artiste lui-même.

Reste malgré tout un sentiment de frustration à l’écoute de The Monster Who Hated Pennsylvania. Il y a quelques mois, en effet, le canadien sortait Unissued, distribué sur son site, un EP brillant aux inflexions résolument pop qui laissait augurer (faussement, au final) une nouvelle orientation dans sa production. Pas sûr que cela suffirait à accroître sa popularité, mais ça aurait probablement écorné l’étiquette de lonesome cowboy que certains lui collent trop facilement.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Helena, Dawn Pretend, Johnny Caravella,Hiding ghosts, Jennifer


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