Damien Jurado – ‘The Horizon Just Laughed’

Damien Jurado – ‘The Horizon Just Laughed’

Album / Secretly Canadian / 11.05.2018
Folk


La trilogie Maraqopa avait placé Damien Jurado très haut au panthéon des auteurs compositeurs folk inspirés et intransigeants, pas loin des Dylan ou Neil Young. Après cette aventure grandiose mais mystique, vaguement psychédélique, The Horizon Just Laughed balaie vite les éventuels doutes. C’est encore une pierre splendide de son oeuvre, et le résultat d’une remise en question du système de production, qui donne naissance à un album épuré, marqué par la densité des thèmes du temps et de la rencontre.

Le cycle Maraqopa avait été produit par Richard Swift (The Shins, Black Keys), et son homogénéité bluffante avait été saluée de toutes parts. Mais ce travail très lourd enfermait Jurado dans une esthétique marquée par l’écho et le vibrato très présents. Il a donc décidé de repartir seul aux commandes, et de retrouver des fondamentaux blues-folk minimalistes laissant la part belle aux émotions brutes.

On est ainsi surpris de l’empreinte que laisse la première écoute. Economie d’arrangements, discrétion extrême (voire absence) des percussions, titres très courts… C’est pourtant la richesse et la variété du son qui étonnent, notamment sur toute la première partie. Après le bref Cindy Lee, virgule d’à peine une minute, quelques balades dépouillées (1973, Lou-Jean) déséquilibrent un peu l’ensemble, faisant retomber l’enthousiasme, avant une fin plus rythmée.

Mais il faut se rendre disponible, et tendre l’oreille. Le traitement soigné du son, parfaitement équilibré, permet de révéler des arrangements toujours discrets, exigeants et justes. L’écoute individuelle des morceaux confirme que The Horizon Just Laughed est définitivement excellent, traversé de nombreuses influences parfaitement intégrées. Damien Jurado est un aquarelliste : par un travail de touches subtiles, presque imperceptibles, il parvient à faire s’épanouir des mélodies bouleversantes.

Ainsi, Allocate ouvre l’album sur des violons soul intimes et vaporeux rappelant les premiers albums de Sade. Puis un piano donne à Dear Thomas Wolfe une atmosphère de jazz-club, avant le climax que forment Percy Faith, Over Rainbows and Rainier, puis The Last Great Washington State, dont les mélodies imparables sont portées par une voix (on pense parfois à Ray Lamontagne) oscillant entre le feulement séducteur ou l’aigu déchiré.

Ce dernier titre persiste longtemps au creux de l’oreille, par la délicatesse du choeur aérien, et les dernières notes d’orgue creusant un vide quand le silence retombe. Un jeu subtil des voix qui semblent se souffler le texte imprègne Lou-Jean, puis les cuivres réveillent Florence-Jean, et insufflent leur énergie à Random Fearless clôturant l’album sur un blues enlevé. Tout prend alors tellement de sens qu’on ne demande plus qu’à repartir.

VIDEO
EXTRAITS

A ECOUTER EN PRIORITE
Percy Faith, The Last Great Washington State, 1973, Florence-Jean


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