25 Juin 07 Box Of Dub – « Dubstep & Future Dub »
[Album]
25/06/2007
(Soul Jazz/Discograph)
Le label Soul Jazz a toujours brillé par ses talents d’archéologue vulgarisateur, compilant ou rééditant des groupes et/ou styles souvent peu documentés en dépit de leur portée historique. Le cas de ce « Box Of Dub » est malgré tout sensiblement différent dans le sens où le sujet traité est encore très récent. On n’entre donc pas dans ce disque avec le recul des années, mais plutôt avec l’appréhension de l’inconnu.
Enième avorton de la foisonnante club culture britannique, le dubstep est en effet surtout véhiculé au travers de mixes de Dj’s/producteurs dans des soirées ou des émissions de radio spécialisées. L’essentiel des sorties est donc encore relativement confidentiel et réservé au support maxi vinyl ou digital. Cette compilation fait donc presque office de premier pavé sur la route vers une reconnaissance d’un plus grand public
Apparue à la toute fin des 90’s, cette excroissance instrumentale du grime s’est peu à peu émancipée vers quelque chose de plus dub, complètement obsédée par les profondeurs du spectre sonore. Si le genre est au départ clairement un dérivé de la 2-Step, du dancehall et de la drum’n’bass (dont il a d’ailleurs surtout gardé les « bass »), l’influence du label illibient new-yorkais Wordsound (Spectre, The Bug, etc.) ou de la scène electro/dub d’outre-rhin (Rhythm&Sound, Pole, Stereotyp…) sur les artistes dubstep est aujourd’hui indéniable. La réciproque peut aussi se vérifier comme nous le prouve le tracklisting de cette compilation, laissant apparaître les noms familiers de Paul St Hilaire (voix officielle de Rhythm&Sound et ici de Sub Version) ou de Kevin Martin (au sein du duo King Midas Song) dont le travail dans Techno Animal, The Bug ou ICE aura fortement marqué les consciences
En sus des deux artistes déjà cités, Soul Jazz aligne donc quelques noms parmi les meilleurs représentants actuels du genre: Kode9 (par ailleurs aussi patron de l’incontournable label Hyperdub), Skream, Burial, Digital Mystikz, Tayo et Scuba
Sur des beats ralentis, et des basses en tsunami, les producteurs dubstep s’amusent à explorer les recoins les plus souterrains et les plus enfouis de l’âme des danseurs. Autant vous dire que ce n’est pas avec un mp3 misérablement compressé que vous allez saisir la substantifique moelle de ce mouvement… Le dubstep s’écoute très fort, si possible en soirée, afin de laisser son corps s’éveiller de lui-même à la conscience. Le dubstep se veut presque une expérience mystique. Laissez vous porter par les basses insidieuses de Digital Mystikz (comme quoi, je n’invente rien!) sur « I Wait » ou « Guilty » et osez dire qu’il ne se passe pas quelque chose de spécial
On l’a vu, le genre se nourrit aussi de ce qui se fait ailleurs, mais on ne pourra néanmoins lui nier une forte identité nationale. Le dubstep est presque un concentré de 25 ans de dance music à l’anglaise (à prendre au sens large, donc!), de Adrian Sherwood à Autechre, en passant par Jah Shaka, New Flesh ou Ganja Krew. On y trouve donc des choses assez diverses pour toucher un public très large. Certains se retrouveront plus facilement dans les beats appuyés du dub hop de Scuba (« Subaqueous », « Respirator »), d’autres préféreront le versant digital roots de Skream (« Irie ») ou Tayo (« Dread CowBoy »), d’autres encore s’émerveilleront devant la techno cinématique et minimale de Kode9 (« Magnetic City »). Il faudrait en tout cas une réelle mauvaise foi pour ne pas acclamer le sublime « Unite » de Burial, gorgé de soul sonne comme un « Blue Lines » de Massive Attack sous 10m de béton armé. Absolument magnifique
Difficile de savoir si le mouvement dubstep survivra à la prochaine trouvaille de la scène électronique britannique qui n’aime rien tant que dévorer ses propres enfants pour en nourrir de nouveaux. On parie cependant qu’on recroisera à l’avenir la plupart des artistes de ce « Box Of Dub », sous cette étiquette ou sous une autre, mais toujours à la recherche de la basse parfaite.
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