26 Oct 10 Clinton Fearon – « Mi Deh Yah »
Album
(Makasound)
28/06/2010
Reggae
Ancien bassiste et choriste emblématique des Gladiators aux côtés d’Albert Griffiths de 1969 à 1987, également auteur d’une vingtaine de titres pour le trio, comme le sublime « Rich Man Poor Man » extrait de l’album « Back To Roots », Clinton Fearon est sans conteste l’un des pères de la musique jamaïcaine. En 1987, il rompt avec The Gladiators et s’installe à Seattle, sans abandonner pour autant la musique, qu’il continue avec passion avec son groupe Boogie Brown Band, fondé en 1993. Inépuisable à la veille de son soixantième anniversaire, Clinton revient aujourd’hui avec un neuvième album solo signé sur la branche Makafresh du label Makasound, qui n’a de cesse de célébrer les grands noms du reggae, que ce soit via sa collection Inna De Yard, ou via la sortie de nouveaux opus de légendes du genre, à l’instar de Winston McAnuff, Linval Thompson et Kiddus I.
« Mi Deh Yah » est ainsi l’un des événements phares de l’année 2010 pour la planète reggae, avant tout parce qu’il est la preuve que le rocksteady est toujours en vie, porté par l’un de ses plus éminents représentants. Titre après titre, les vibes roots des années 70 se déploient avec enthousiasme, ravivant bien sûr les heures de gloire des Gladiators, de The Heptones, mais également de Steel Pulse, comme sur l’excellent « Life Is A Journey » sonnant un brin plus eigthies. Sur des versions soignées, précises et harmonieuses, entièrement composées par Clinton Fearon lui-même (qui joue également de plusieurs instruments tout au long de l’album), la magie de la voix du chanteur continue d’opérer, comme sur l’aérien « Rock And A Hard Place », l’engagé « What A World », ou l’ultra roots « Are You Ready ». Au-delà de cette ode à l’âge d’or du one drop, on relèvera dans ce « Mi Deh Yah » la présence de quelques touches plus personnelles, comme la portée délicieusement soulful de « Tell The World », le ska déchaîné de l’instrumental « Focus », ou encore la présence de nappes de violon dissonantes et mystiques sur un « Feeling Blue » résolument moderne. L’album s’achève en beauté sur « Working For The Man », une perle early roots agrémentée d’un solo de sax, jazz à souhait.
Avec « Mi Deh Yah », Clinton Fearon parvient donc près de 40 ans plus tard à ressusciter l’âme de Studio One et Channel One tout en laissant s’exprimer sa grande créativité, aussi bien au niveau du chant que des instrumentaux, qui présentent une qualité, une cohérence et une finesse qu’il est bien rare de trouver dans des albums de reggae aujourd’hui. « Mi Deh Yah » est ainsi une galette gorgée de richesses qui se révèlent écoute après écoute, comme le merveilleux solo de guitare niché entre deux refrains inspirés de « Better Days », ou l’intro bluesy de « Jamaïca ». D’ores et déjà une référence intemporelle du « roots rock reggae », à consommer sans modération pour ne pas prendre froid cet hiver.
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