Catchy Peril – ‘Disco Sucks’

Catchy Peril – ‘Disco Sucks’

EP / Autoproduction / 01.11.2024
Nuclear disco punk

Le mistral qui souffle en Provence, ce vent froid venu du nord, est, selon Nietzsche, un ‘tueur de mélancolie’. Ce qui parvient à nos oreilles de Marseille depuis quelques mois et qui embrase les scènes rock locales a cette vertu. On a déjà parlé dans ces colonnes de SoVox, La Flemme, Technopolice, Parade, ou Avee Mana. On aurait bien volontiers parlé de Crache ou Avenoir si le temps ne nous avait pas été compté. On ne manquera pas, aujourd’hui, de tout lâcher pour profiter de la nouvelle bourrasque secouant la cité phocéenne, Catchy Peril, le remède automnal parfait pour nos humeurs maussades.

Fondé par le guitariste et chanteur Benjamin Delair en 2023, le groupe réunit Paul Blanes à la basse, Kevin Plasse à la batterie et Louise Baudu aux claviers autour d’un cocktail détonnant et irrésistible de punk, de disco et de crank wave, le tout avec une identité visuelle très forte à base de résille et maquillage inspiré, entre autres, d’Adam Ant et des nouveaux romantiques. Après avoir publié au début de l’année un fascinant et fougueux premier single, Come Closer, le quatuor s’est enfermé avec le producteur Jearc au Local Studio 54 pour enregistrer son premier EP, Disco Sucks. A l’écoute des quatre titres qui le constituent – séduisants immédiatement, inventifs en permanence, et totalement réjouissants en définitive – il est difficile de croire que Catchy Peril n’a qu’une seule année d’existence. Il possède indéniablement ce souffle, parfois léger et souvent impétueux, qui fait qu’on est prêt à le ranger d’emblée dans la catégorie des groupes à part parce qu’à suivre.

Dancing, le premier titre, c’est l’équivalent musical des montagnes russes : ça commence lentement, avec une mélodie vocale susurrée de cette manière équivoque que Fat White Family a initiée, ça se précipite dans une folle descente punk, ça rebondit vers des sommets pop. C’est joyeux et exubérant dans la forme, lucide et critique dans le fond (‘I don’t feel like dancing / Feel like dancing‘ avoue le refrain, mettant ainsi en lumière les contradictions de nos vies vouées au consumérisme). Deserve Better, qui suit, tout comme She’s Bored un peu plus loin, frayent les territoires plus sombres de la new wave parcourus par des rafales punk cinglantes, et optent pour un ton plus direct et nerveux, contenant la frustration pour le premier, ou l’expulsant dans un mouvement libérateur pour le second. Le dark disco d’Angry Kids, avec sa rythmique démoniaque, crée une atmosphère surréaliste autour du récit d’une fusillade s’étant réellement déroulée dans les rues de Marseille. Tendu au possible dans ses couplets, léger et relâché dans ses refrains, le seul morceau en français de l’EP montre tout le talent de Catchy Peril à mélanger les genres sans jamais se perdre. Nico, pour finir, belle et émouvante ballade traitant de la perte d’un être cher, développe une mélodie comme en apesanteur, nous plongeant dans des limbes suffisamment indistinctes pour nous faire rêvasser mais pas assez épaisses pour nous faire oublier la douleur du deuil.

En évoluant au gré de ses envies entre les styles sans jamais se laisser envelopper de façon trop marquée par l’un d’entre eux, Catchy Peril se veut un groupe nomade, cultivant avec adresse et bon goût son ambiguïté, tout en affirmant résolument son esprit libertaire. Dans ce désir de ne pas se situer, le groupe marseillais parvient à faire de sa musique un champ des possibles où se côtoient l’évidence pop, l’attraction disco et la virulence punk, et où souffle ce vent fort qui, loin de rendre fou, nous fait accepter et, même, désirer la réalité, y compris dans ce qu’elle a de plus cru.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Dancing, Angry Kids, She’s Bored.


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