Bon Iver – ‘i, i’

Bon Iver – ‘i, i’

Album / Jagjaguwar / 09.08.2019
Indie folk pop

Depuis son éclosion en superstar de l’indie folk à la fin de la dernière décennie, à la faveur d’un magnifique premier album devenu un classique incontournable, le chemin parcouru par la bande de Justin Vernon a de quoi laisser pantois. Alors qu’avec For Emma, Forever Ago il inspirait une quantité impressionnante de suiveurs plus ou moins talentueux, Bon Iver n’a – quant à lui – cessé de s’éloigner des terres solitaires et reculées de ses débuts pour étendre ses terrains de jeu et élargir considérablement son public au passage.

Cette mutation progressive du barde solitaire au groupe de pop moderne fut amorcée dès le second album éponyme, qui conviait déjà de prestigieux collaborateurs pour dresser des arrangements touffus au service d’une vision toute personnelle des territoires nord-américains. Après un hiatus de quelques années qui l’amenèrent à collaborer avec le gratin du RnB et de la pop électronique (de Kanye West à James Blake), Justin Vernon vint parachever sa mue en 2016 avec un disque faisant la part belle aux samples, voix pitchées à grand renfort d’autotune et sonorités synthétiques solidement ancrées dans son époque (22, A Million).

Inscrit dans la droite lignée de son prédécesseur, i,i ne constitue pas tant une révolution qu’un prolongement de la discographie du groupe. On y retrouve à nouveau les collages sonores et arrangements riches (notamment avec des cuivres omniprésents) qui forment désormais l’identité musicale d’un collectif multipliant toujours davantage les collaborations dans une démarche finalement pas très éloignée dans son résultat de Big Red Machine, le projet musical collaboratif né à l’initiative de Justin Vernon et Aaron Dessner (The National).

Si les premiers titres laissent présager un virage RnB de plus en plus affirmé (particulièrement sur iMi et ses samples de voix distordues), ils ne forment en réalité qu’une partie de la diversité sonore déployée par le groupe, reflet de son évolution au fil des années. Hey Ma, titre le plus direct et accrocheur de l’album, apparaît ainsi comme un contrepoint synthétique à leur hymne Heavenly Father, tandis que Marion, ballade acoustique (relativement) dépouillée, renvoie aux moments intimes plein de grâce suspendue de For Emma, Forever Ago. Les penchants aventureux du groupe y sont également exprimées avec plus ou moins de réussite, notamment sur l’étrange Jelmore ou encore sur le solo de saxophone venant clôturer Sh’Diah.

Cet éclatement de formes et de couleurs, qui paraîtrait à première écoute difficilement digeste, n’en demeure pas moins remarquablement cohérent grâce à cet ingrédient particulier qu’est la voix de baryton et de fausset immédiatement reconnaissable de Justin Vernon. Grâce à ce médium unique, Bon Iver parvient à nouveau à conjuguer le grandiloquent et l’intime au sein de fresques oniriques lumineuses (Faith et Salem, sommets de l’album). Réussite incontestable pour Bon Iver, particulièrement au niveau de la production irréprochable, i,i offre un écrin gracieux à des compositions qui ne retrouvent cependant pas le souffle des meilleurs titres du groupe.

VIDEO
ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Faith, Marion, Salem, Hey Ma, Sh’ Diah


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