
01 Août 23 Blur – ‘The Ballad of Darren’
Album / Parlophone / 21.07.2023
Indie pop
S’il nous met évidemment en joie, ce retour de Blur n’était plus vraiment attendu. Quelques dates sporadiques durant la dernière décennie et des musiciens vaquant à d’autres projets et occupations n’auront pas suffi à faire repasser la formation originelle d’Albarn & Cie au premier rang qui fut jadis le sien. Pas d’espoirs particuliers donc, mais une sincère curiosité de découvrir ce que le groupe anglais pouvait bien avoir à proposer en 2023, d’autant que le communiqué de presse avait déjà de quoi faire saliver : un nouvel album né spontanément, une bande de copains réunis dans la bonne humeur, Damon Albarn riche de quelques chansons composées lors de ses dernières tournées avec Gorillaz, et une réalisation rapide et sans fioritures sous la houlette du producteur James Ford (Arctic Monkeys, Foals). Au final, The Ballad of Darren aligne douze nouveaux titres, dont The Narcissist, premier extrait mielleux envoyé en éclaireur au printemps, et le plus vicieux et rassurant St. Charles Square que n’aurait certainement pas renié David Bowie à l’ère de son Scary Monsters.
Mais qu’en est-il du reste ? C’est malheureusement là que le soufflé retombe. Car tout s’apparente ici à un véritable album solo de Damon Albarn entouré de ses fidèles comparses en guise de backing band. Rarement la triplette Coxon/James/Rowntree ne sera restée aussi discrète et effacée. Hors, la signature musicale et le génie de Blur ont toujours majoritairement résidé dans l’équilibre parfait entre le songwriting du chanteur et le coté dynamiteur du guitariste, tristement relégué ici à un rôle d’accompagnant soporifique.
Bien qu’imparfait, le précédent album The Magic Whip (2015) frappait par son inventivité et sa diversité. The Ballad Of Darren, lui, sombre dans une homogénéité virant à la monotonie et à la morosité ambiante. Les refrains faciles et les mélodies d’une naïveté mièvre s’enchainent sans grand intérêt (Barbaric, Goodby Albert), provoquant ce même ennui rencontré sur les dernières oeuvres solo d’Albarn (The Nearer The Fountain, More Pure The Stream Flows notamment) ou sur le dernier essai de The Good The Bad & The Queen sorti en 2018. Malgré quelques moments de grâce comme le très Lennonien Russian Strings, la jolie ballade The Everglades en hommage à Leonard Cohen, ou encore la très déchirante conclusion The Heights, les chansons peinent à s’inscrire dans nos mémoires, et contribuent à faire de cette nouvelle salve un disque beaucoup plus quelconque qu’intemporel. Si Damon Albarn a su nous cueillir plus d’une fois en jouant sur la corde sensible de la mélancolie, nous lui préférons aujourd’hui le spleen sans doute plus percutant de compatriotes britanniques comme King Krule, Grian Chatten ou PJ Harvey.
Dans un sens, il est positif de voir que Blur ne fait pas du surplace et ne succombe pas aux sirènes du fan service ou à une quelconque envie de renouer avec son passé brit-pop qui se serait révélée être une grossière erreur. Damon Albarn et ses acolytes ont plutôt choisi ici de s’essayer à quelque chose de différent, de plus classieux et de plus doux, sur un nouvel album très clairement marqué par l’âge et la maturité. Dommage seulement que les quatre anglais aient délaissé la partie la plus audacieuse de leur musique, et qu’à l’image de la photo qui illustre The Ballad Of Darren, ils n’aient pas quitté le calme de leur piscine pour aller affronter des eaux plus déchainées.
A ECOUTER EN PRIORITE
The Ballad, St Charles Square, Russian Strings, The Everglades (for Leonard), The Heights
Moi
Posted at 08:23h, 02 aoûtAh! Enfin une critique qui ne fait pas l’éloge inconditionnel de ce disque qui est à mes yeux (et surtout a mes oreilles) dispensable (et trop inspiré de Bowie).