Black Bones – ‘Ghosts & Voices’

Album / 27.03.2020
Indie pop

Se replonger dans le passé pour mieux fuir le présent et préparer le futur. Black Bones a bel et bien décidé de jouer à tous les temps avec Ghosts & Voices : un nouvel album qui pioche allègrement dans la pop psychédélique 60 et 70 pour affirmer ses influences indie rock des années 90, au premier rang desquelles on croise Pixies, Pavement et Ween. Quelques noms qui se faisaient déjà entendre à la fin des années 2000 alors qu’Anthonin Ternant – le leader du groupe – officiait chez The Bewitched Hands. Ceux qui ont connu la formation rémoise – et qui ont donc assisté à son succès avorté – ne manqueront d’ailleurs pas de faire le lien tant, ici aussi, la voix du bonhomme suffit parfois à signer quelques tubes.

Il y a chez Black Bones l’ambivalence de certains de ses ainés, cette faculté de mêler l’humour et le second degré à la mélancolie, comme pour se laisser une porte de sortie en toutes circonstances. Parce qu’il invite à relativiser, parce qu’il laisse passer le soleil entre nos murs et nous fait siffloter, Ghosts & Voices ne pouvait mieux tomber. Rendu comme christique par sa réverbération de cathédrale, ses orgues et ses chants haut perchés (Love as a Child, I’m a Believer), comme par son histoire (le groupe a travaillé ses compositions dans un ancien couvent transformé en résidence), le disque s’enveloppe d’une aura aussi intemporelle que mystique, qui passionne autant qu’elle perturbe, au point de se porter garante de sa singularité.

Car Black Bones a beau ne jamais renverser l’échiquier, tout ici invite à lui donner le bon Dieu sans confession, aveuglés que nous sommes par cet épais catalogue de mélodies lumineuses ou chaque inspiration, chaque idée d’arrangement semble sans mal trouver sa place. En effet, qu’il s’agisse des pipeautés Love As a Child et Marianne, du contre temps festif de Creepy Rain, des délires cartoonesques de Monster, du final electro pop disco Beauty, ou encore des imparables Dead Skies et New Angel renvoyant illico The Shins en ligue amateur, tout fonctionne à merveille, et rien – ou presque – ne vient ici gâcher la messe. C’est à cela qu’on reconnait un grand album, ou alors on n’y connait rien.