Big’n – ‘End Comes Too Soon’

Big’n – ‘End Comes Too Soon’

Album / Computer Students / 15.11.2024
Noise rock

Il faut bien le reconnaître : la scène bruitiste américaine des 90s – celle de Chicago en tête – fut particulièrement prolifique, au point qu’il était presque inévitable que le commun des mortels passe alors à côté de plusieurs pépites du genre. Big’n – révélé via ses intenses prestations live et ses deux excellents LPs, Cutthroat (1994) et Discipline Through Sound (1996) – eut beau en faire partie, le groupe ne bénéficia alors que d’une aura limitée. Selon Steve Albini – aux manettes pour l’enregistrement du deuxième album – le fait que le grand-frère du guitariste (Todd Johnson) soit à l’époque frontman des réputés Shorty et US Maple ne lui a pas forcément facilité la tâche. Sur fonds de tensions internes, la bande raccrocha en 1997, avant de finalement glaner une notoriété posthume. Fin de l’histoire… ou presque.

Car c’était sans compter la vénération dont a fait preuve un certain Julien Fernandez à l’égard de Big’n. En 2011, l’ex-batteur du duo Chevreuil, alors patron du label Africantape, parvint en effet à convaincre le quatuor de rééditer d’anciens morceaux, et même d’en enregistrer de nouveaux dans la foulée (Spare The Horses). De quoi aider la bête à se remettre sur pied, et lui redonner envie de grogner de plus belle. Chose confirmée avec la sortie en 2018 d’un nouvel EP, Knife Of Sin, puis la réédition ‘augmentée’ de Discipline Through Sound quelques années plus tard, et cela, toujours avec la complicité d’un Fernandez désormais aux commandes de Computer Students, sa nouvelle écurie aux artworks et packagings emblématiques.

Malgré cette décennie plutôt active pour un groupe miraculeusement revenu d’entre les morts, l’annonce de la sortie d’un nouvel opus a pris nombre de ses aficionados au dépourvu. Et à l’écoute de End Comes Too Soon, on comprend très vite que ces vétérans ont pris la chose au sérieux en nous servant un véritable concentré de noise rock, aussi furieux que millimétré. Dès les premiers instants de South of Loathsome – puis tout le long des neuf titres constituant l’album, ponctués d’une poignée d’interludes répétitifs ajoutant leur dose de lourdeur et de tension -, impossible de ne pas se faire littéralement happé par cette rythmique aussi hypnotique que malaisante, ces à-coups de basse aux textures métalliques, et ces riffs de guitare incisifs au contenu harmonique plutôt riche pour le genre. William Akins, quant à lui, éructe toujours autant de messages pour le moins sombres (‘I’d rather be dead than rest my weary head‘, ‘He has a heart full of hateful harpoons‘, ou ‘This place is fucked / There is poison underneath the sink‘) en usant de cette voix torturée et inquiétante, oscillant entre grommellements façon David Yow (The Jesus Lizard), une noirceur à la Raygyun Busch (Chat Pile) et spoken word bruts rappelant Steve Albini (Shellac, Big Black).

Ce dernier portait d’ailleurs Big’n très haut en estime, et inversement. Bien que choisi avant ce bien triste jour du 7 Mai 2024, le titre End Comes Too Soon sonne donc aussi comme un bel hommage posthume au collaborateur et ami du groupe, qui a certainement pu assister à certaines sessions de son enregistrement ayant eu lieu dans les murs de son studio Electrical Audio entre mars 2023 et avril 2024. Nul doute qu’il devait être fier d’un retour aux affaires si flamboyant de ces quatre acolytes.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
South of Loathsome, Arkansas Death Cult, To Hell With The Sun, Capsized


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