Ben Shemie – ‘A Single Point of Light’

Ben Shemie – ‘A Single Point of Light’

Album / Hands In The Dark / 12.06.2020
Synth-pop lo-fi

On entre dans A Single Point Of Light comme dans un profond sommeil. Non que l’album soit soporifique, mais il invite au lâcher prise, à la divagation songeuse. Une impression de rêverie abstraite se dégage dès la première écoute, et l’artwork sérigraphié de Marie-Douce Saint-Jacques (qui avait signé celui du précédent LP) va également dans ce sens. Les sonorités ont un caractère arrondi et doux, renforçant l’incitation méditative.

Ben Shemie poursuit clairement le travail commencé avec A Skeleton, sorti également chez Hands In The Dark l’année dernière. On pourrait d’ailleurs aisément envisager les deux LP comme deux facettes d’un même projet, tant leurs univers sont proches, même si le second volet est plus mélodique et moins expérimental que le premier. Les principes de conception sont restés identiques : le procédé consiste à jouer et enregistrer dans des conditions live, en une journée, sans overdubs, avec Dave Smith une nouvelle fois aux manettes. Contraintes oblige, on est plus proche du lo-fi que de la grosse production.

Le processus contraignant du live recording peut interroger, voire susciter des curiosités. En effet, on aurait envie de savoir ce que le canadien proposerait sans ces limites qu’il s’impose, même si le fait de limiter les possibles par le temps et le format lui évite probablement de s’égarer dans un perfectionnisme sans fin. Mais le caractère onirique voire ambient de certains titres (Highway 10, Dream) aurait probablement été sublimé par une production plus élaborée, avec overdubs autorisés. On ne peut évidemment pas reprocher au leader de Suuns de s’être orienté vers une approche très intimiste pour mener à bien son projet solo. Certains morceaux conservent d’ailleurs la force mélodique des titres phares du groupe canadien, notamment le single Change.

Même lo-fi, les sonorités restent d’une grande richesse, et l’on est finalement face à un équivalent de home recording en guitare voix d’un artiste folk, mais dans une version synthétique. Shemie partage davantage avec ces solitaires à six cordes que l’on ne pourrait le penser. L’importance de la voix, de la singularité de son timbre, dusse-t-il être retravaillé au vocoder, est rare dans une musique dominée par l’électronique. Il y a dans la proximité des voix quelque chose qui, combiné à leur traitement artificiel, les rend troublantes. Robot humanisé, plutôt que l’inverse. L’approche solitaire et romantique de Ben Shemie renforce la mélancolie de A Single Point Of Light. Qu’il traite d’un personnage squelettique sur son opus précédent ou de la thématique lumineuse, son approche a des aspérités de robots vintage en fin de vie. le traitement de sa voix sur Magic Eye peut ainsi nous renvoyer au chant du cygne mythique de HAL dans 2001, l’odyssée de l’espace. Mais  en version chambre d’étudiant à Montréal, plutôt que dans les studios de la Warner.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Change, The River


No Comments

Post A Comment